21 Juillet 2015
C'est l'histoire de Jay qui couche avec son petit copain à l'arrière d'une bagnole.
Le problème c'est qu'il lui a refilé une saloperie. Pas le genre qui gratte, qui pique et qu'après ça brûle ou qui déglingue le système immunitaire de façon définitive, non : plutôt le genre où une "chose" va se mettre à la suivre à n'importe quel moment en prenant l'apparence de n'importe qui (connu ou inconnu, mort ou vivant, habillé ou à poil, vieux ou jeune, en bonne santé ou plus très frais...).
Le côté "positif" (si on peut l'appeler comme ça) c'est que contrairement à la chtouille, si elle couche avec quelqu'un d'autre, elle lui passera le relais (et toute la merde qui va avec) et qu'elle en sera débarrassée. Sauf que si la "chose" le ou la chope (et la rétame, en la pliant en 12, par exemple, comme la nana du début), la malédiction reviendra sur elle...
Elle est lente mais elle est pas conne.
Imaginez Wes Craven (pour les codes du teen horror movie) qui rencontrerait Charles Burns (pour la malédiction sexuellement transmissible comme dans Black Hole), qui rencontrerait Danny Boyle (pour le main theme qui fait drôlement penser à celui de Petits meurtres entre amis), qui rencontrerait Quentin Dupieux (pour l'atmosphère visuelle et musicale), qui rencontrerait Max Brooks et Slender (pour le côté entité flippante qui serait pas sous amphétamines), qui rencontrerait David Lynch (pour l'aspect Twin Peaks), qui rencontrerait Walter White (pour le mec à poil sur le toit), qui rencontrerait Rob Reiner (et plus généralement les teen movies des années 80, pour l'absence d'adultes et l'ambiance mélancolique), qui rencontrait Stephen King (pour le "It"), qui rencontrerait finalement David Robert Mitchell (le réalisateur, pour ceux, là-bas au fond, qui auraient pas lu l'affiche)... Et bien, vous aurez un vague aperçu de ce que It Follows peut donner.
Une œuvre magnifiquement filmée, terriblement angoissante, qui a l'intelligence de ne pas donner d'explication et de laisser le spectateur se démerder pour essayer de comprendre (ou pour échafauder des théories et s'écharper ensuite sur le net avec ceux qui ne sont pas d'accord).
Un film à voir plusieurs fois (parce qu'au premier visionnage, on est trop occupés à fouetter sa mère en faisant "petit trou" avec ses mains devant les yeux pour véritablement tout bien piger... Surtout quand on est obligés de mettre 75 fois "pause" à cause d'enfants insomniaques... Et chiants).
Un film qui s'amuse avec les angoisses des personnages (et, celles du spectateur), qui joue habilement sur les points de vue, créant une tension inimaginable pour mieux surprendre (mais sans tomber dans la mécanique du Jump Scare systématique) avec une sublime BO électro qui s'associe parfaitement à l'image, superbe, et ses plans larges, fixes ou rotatifs, qui nous forcent à scruter, même si on n'en a pas envie, tenaillés par la peur, pour créer une dynamique lancinante de trouille.
Car le réalisateur, grâce à un talent indéniable dans ses prises de vue, arrive à mettre le spectateur dans le même état que l'héroïne, dans cette attente paranoïaque que "La chose" apparaisse, jusqu'à ce plan final, subtilement malsain, où l'on passe de chassé à chasseur.
Un film d'horreur magistral.