15 Avril 2015
Un cinéaste reconnu travaille sur son prochain film, consacré à la monstruosité dans la peinture.
Il est guidé dans ses recherches par une historienne d’art avec laquelle il entame des discussions étranges et passionnées.
Je mentirais si je disais que j'ai tout bien compris. En même temps, je ne suis pas tout à fait sûre que le souhait du réalisateur fût de faire un film limpide...
Une œuvre étrange (voire légèrement barrée), ultra référencée (à la limite, parfois, du "name dropping", pour le profane), qui devait être à l'origine un documentaire sur le cinéaste Bertrand Bonello, pour s'en éloigner au fur et à mesure des trois ans qu'a duré le tournage, jusqu'à devenir une fiction.
Où on a un peu l'impression que tous les personnages sont soit plus ou moins dépressifs, soit sous Tranxene.
Mais n'est-ce pas le propre de l'artiste d'être torturé ? Surtout lorsque le sujet porte sur la recherche de la monstruosité dans l'art.
Nous sommes ici face à une réflexion sur l'inspiration et sur le processus de création, sur la quête artistique au sens large, explicite et implicite (de par l'utilisation subtile de la musique par exemple), où l'on retrouve l'aspect hybride très intéressant entre le documentaire et la fiction dans les divers choix cinématographiques de filmer une peinture ou une sculpture, tantôt dans leur intégralité, tantôt suggérées, tantôt morcelées.
Si l'on veut plaisanter, on pourra se demander : A-t'on tous l'air aussi... "inspirés" quand on regarde intensément une œuvre d'art ?
Mais plus sérieusement, on ne remarque pas du tout la différence entre les scènes écrites et les scènes improvisées tant les dialogues sont fluides et la complicité entre les interprètes est palpable (le Bonello-acteur, inspiré, a amplement mérité son prix d'interprétation au festival de La Roche-sur-Yon).
Pour ce qui est du côté fictionnel, on sombre tout à coup dans les méandres et l'ambivalence de la psyché du personnage principal (l'apparition du double, la reproduction photographique du tableau avec le garçon au soutien-gorge, des soirées plus ou moins mondaines, une partouze androgyne, une femme à barbe, un repas sous substances, une chanson improvisée au lyrisme qui n'est pas sans rappeler Opium d'Arielle Dombasle), où l'on se perd entre ce qui est de l'ordre du réel ou du fantasme dans sa quête du monstre inspirateur de son nouveau film.
Enfin, ce qui est plutôt rigolo, c'est qu'on peut y voir une forme de dénonciation des prises de tête à la limite de la "branlette d'intellos" que doivent subir les cinéastes en interview, dans les magazines spécialisés et sur le net, cette sur-interprétation de leur démarche artistique...
Un récit passionnant, fascinant dans sa démarche de décryptage sensible de l'art, et déroutant.
C'est toujours plus intéressant quand c'est exagéré.
Le dos rouge.
Réalisé par : Antoine Barraud / Genre : Comédie dramatique / Nationalité : Français.
Casting : Bertrand Bonello, Jeanne Balibar, Géraldine Pailhas...
Date de sortie en salle : 22 Avril 2015 / Durée : 2h07min