3 Novembre 2016
Jacob est un enfulte qui vit en Floride (comme l'auteur du roman éponyme dont le film est une adaptation) et qui aime bien son papy même si maintenant, il déconne un peu du dedans de son cerveau.
Parce que, voyez-vous, ça n'a pas toujours été le cas, comme, par exemple, lorsqu'il venait le garder le soir, quand il était petit et que son papa et sa maman voulaient faire semblant d'avoir encore une vie sociale en se rendant aux réunions de leur club de partouze-cagoule (ou de lecture).
Et même que son papy, à cette époque où il était encore en parfaite santé mentale, il lui racontait plein de jolies histoires sur sa jeunesse en Pologne, peuplées de créatures féeriques et enchantées comme des nazis ou des enfants avec une bouche derrière la tête, sosies de Tom Jedusor, invisibles, volants ou tout simplement cracheurs d'abeilles, enfermés dans un orphelinat sur une île paumée en Europe... Le tout avec photos mi-sépia mi-floues mi-gothiques à l'appui (un peu comme dans LES AUTRES... et oui : ça fait 3 moitiés) pour lui assurer des nuits sereines et paisibles.
Bref, après être copieusement passé pour un gros gland auprès de ses petits camarades de classe en leur présentant les-dites photos et avoir essuyé toutes formes de railleries plus ou moins agréables et encourageantes pour son ego en construction, le Jacob avait légèrement pris ses distances avec Papy-zinzin.
Mais un jour, Papy-mytho l'appelle tout paniqué parce qu'il semblerait que les méchants de son enfance l'aient retrouvé !
Par acquit de conscience, Jake se rend au domicile de son aïeul afin de l'empêcher d'être accusé d'attentat à la pudeur en courant à poil derrière le bus de ramassage scolaire tout en hurlant "ils arrivent, ils arrivent !!!".
Sauf que le papy déconnait peut-être pas tant que ça : après avoir assisté, impuissant, à la fuite d'une créature merveilleuse tout à la fois Muto, Slenderman monté sur échasses, et Alien (avec des tentacules en guise de double gueule), qui venait tout juste de voler les yeux de son grand-père (et de lui lacérer le bide, accessoirement), Jacob recueille dans un dernier râle ces paroles énigmatiques :
Sauve la Cheerleader, sauve le monde... Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras... Va sur l'île, trouve l'oiseau, entre dans la boucle... Tant va la cruche à l'eau qu'à la fin la caravane passe... La source, la source...
Malgré une longue période de thérapie pour le persuader qu'en plus de son groupe sanguin et d'un prénom à consonance hébraïque, il avait également hérité de l'esprit malade et hallucinatoire de son grand-père, la psy de Jacob, en désespoir de cause, lui conseille de se rendre finalement sur cette fameuse île pour bien comprendre une bonne fois pour toute que cette histoire d'orphelinat pour enfants particuliers n'était qu'une vaste fumisterie...
Alors certes ça n'est peut-être pas le meilleur film de Tim Burton (pour ceux qui aiment son univers, bien sûr, les autres, faut lâcher l'affaire maintenant, vous ne le changerez pas le bonhomme). Mais ce n'est pas le pire non plus (suivez mon regard...), même si l'on peut regretter un happy-end un poilounet bâclé sur un sujet qui aurait largement pu mériter un film entier...
Comptait-il mourir bientôt le Tim qu'il ne pouvait pas nous pondre une suite digne de ce nom ? Ou bien le projet l'avait-il gavé et voulait-il passer rapidement à autre chose ? Ou encore est-ce simplement parfaitement fidèle au roman ? Mystère...
Et c'est au moins un vrai film de cinéma qui a le mérite de procurer quelques émotions et d'avoir un véritable univers : celui du bouquin, bien sûr, mais avec tout de même une bonne dose de vision burtonienne du truc pour lui donner vie... À moins que Ramson Riggs n'ait eu en tête les films du réalisateur en écrivant ses romans et dans ce cas, v'la la consécration !
Mais le film a également pour lui de nous couper de la réalité pendant deux bonnes heures qui passent à une vitesse insensée, et ce malgré des passages où l'on décroche pour des prétextes plus ou moins valables : le combat entre les Sepulcreux et les squelettes animés tout en images de synthèse très moches, le terme-même de "Sepulcreux", qui sonne un peu comme quand des gamins de maternelle disent "bulbeux" pour nommer les oignons à fleurs, le côté Clochette dans HOOK du personnage d'Emma...
Mais a posteriori, on peut aussi se dire que ce visuel parfois franchement pas jojo était quelque part un peu obligatoire pour permettre au film de conserver son visa tout public : un truc impeccablement réalisé tout du long aurait été beaucoup trop effrayant pour des gosses (même s'ils ne possèdent pas tous les codes et références qui peuvent nous faire baliser, nous, adultes matures et tellement responsables).