22 Février 2015
Il était une fois le stagiaire ingé-son chargé de jouer la BO de Twilight au piano avec 2 doigts et une élève de Petite Section de maternelle qui aurait vachement redoublé (on dit "être maintenu" maintenant mais ne chipotons pas).
Comme le stagiaire avait fait du super bon boulot sur la saga précédente, on lui a dit en post-prod :
"La prochaine merde pour adolescentes en chaleur, promis, c'est pour toi. T'auras plein de costumes dans plein de nuances de gris différentes et aussi plein de voitures qui vont vite et tu pourras utiliser tous tes doigts (et même plus) et tu montreras un quart de tiers de ton zizi si tu veux, que ça nous fera obtenir une interdiction au moins de 12 ans en France et que ça sera hyper osé et que ça fera le buzz par la même occasion".
La fille, elle, malgré un super PPRE (programme personnalisé de réussite éducative), ne sait toujours pas se défendre quand ses petits camarades s'attaquent à sa frange avec des ciseaux à bouts ronds (ce qui fait d'elle une proie facile pour tout sadique, petit ou grand).
La suite de l'histoire, vous la connaissez (si vous vous êtes infligé le bouquin) et si ça n'est pas le cas, vous en trouverez un résumé ici (quoi ? J'ai bien le droit de faire de l'auto-promo quand même !).
Non parce que niveau narration, c'est très, mais alors TRÈS, fidèle au roman de base (pour ce qui est de l'alignement de poncifs, de métaphores phalliques et d'allusions sexuelles).
Sauf que c'est nettement moins pourri visuellement que ce à quoi je m'attendais.
Mais (parce qu'il y a un mais) ça demeure une sorte de chose hybride franchement pas réussie.
J'explique :
La Ana, qui se mord 23 fois la lèvre inférieure, est nettement moins courgette que dans le bouquin (elle ferait même un peu la maligne d'ailleurs) puisque, magie de l'adaptation, ses moult tergiversations à la con ont été zappées (au profit de la trame narrative), et le sexe y est carrément édulcoré (voire presque totalement absent si l'on compare avec le livre).
Qui plus est, ça n'est véritablement pas la peine de se casser la nouille à essayer de l'acheter avec des cadeaux ou à utiliser des instruments de tortures divers et variés étant donné que c'est tellement une chaudière (voire une bombe à retardement voire une baraque à frites voire une usine oestro-progestative) qu'un simple souffle d'air suffirait à la faire grimper aux rideaux (ce qui relativise là aussi nettement les performances sexuelles du monsieur).
On est donc à mi-chemin entre une mauvaise comédie romantique et un mauvais film porno pseudo-SM (j'entends par là un film porno qui garderait ses dialogues hautement philosophiques mais qui n'aurait pas de véritables scènes de cul... Intrinsèquement mauvais donc).
Ce qui donne un mauvais film tout court : le métissage, c'est très chouette dans plein de domaines mais pas là, non (en même temps, je ne vois pas comment l'adaptation d'un mauvais roman érotico-cul-cul aurait pu donner un bon film, le challenge était bien trop grand).
On ne polémiquera pas non plus (parce que ça enlèverait au comique de la chose) sur cette espèce de discours moralisateur salement pervers sur le fait que la recherche du plaisir autre que par la position du missionnaire (une amazone ? Une petite levrette ?... Ah non même pas) est forcément liée à une enfance traumatisante ou à un viol co (c'est comme les sports co sauf qu'on est pas d'accord) : non ça c'est juste la condition sine qua non pour participer à une émission de télé-réalité...
On passera donc aussi (ou pas) sur les diverses aberrations du script :
- Anastasia Steele est-elle la seule personne à trouver systématiquement une place juste devant l'immeuble (le phallus vitré ?) de la Grey House en plein centre ville de Seattle ?
- ça ne choque personne que ce soit une étudiante en littérature anglaise qui fasse le job pour sa colloc malade et pas un autre étudiant en journalisme ?
- ni que, lorsque la blondasse d'élevage vient interrompre l'entrevue en disant que le prochain RDV de Cricri est arrivé, Ana dise "ça tombe bien, on a terminé" mais qu'après elle se plaigne à sa colloc' de ne pas avoir posé la moitié de ses questions ?
- ça ne choque pas plus que Kate (la colloc en question) soit miraculeusement guérie quand Anastasia rentre à la maison ?
- ni que l'interview n'ait servi strictement à rien puisque le type a renvoyé toutes les réponses aux questions par mail ?
- quand tu te réveilles avec une gueule de bois de compèt, dans la chambre d'hôtel d'un total inconnu, fut-il milliardaire (et qui, rappelons-le, est juste venu acheter de la corde, de l'adhésif et des liens en plastique dans le magasin de bricolage où tu bosses) sans aucun souvenir de la nuit que tu viens de passer et qu'il t'a laissé deux pilules indéterminées sur le chevet en t'intimant l'ordre (via post-it) de les manger, ton premier réflexe sera-t-il évidemment de les avaler sans te poser aucune question ?
- quand ce même inconnu, si riche soit-il, te sort qu'il a des goûts particuliers, t'empresseras-tu de lui répondre "initiez-moi" sans même chercher à savoir ce que sont ces fameux goûts ("j'aime violer des petites vieilles, éclater des chatons contre des murs et manger des nourrissons"... "Ah bon ben c'est cool, allons-y !") ?
- pourquoi lorsqu'il lui demande "vous voulez boire quelque chose ?" pense-t-on irrémédiablement "juste un doigt" ?
- quand vous montez dans l'hélicoptère de quelqu'un (ça marche aussi avec une bagnole), que vous n'êtes que deux et que ce quelqu'un s'installe au poste de pilotage, la première question qui vous vient à l'esprit sera-t-elle "vous savez piloter ?" ?
(Réponse 1 : "non et toi ? Je comptais justement dessus, merde alors" / Réponse 2 : "oh ben non : c'est une mission suicide" / Réponse 3 : "d'après toi connasse, t'as pas vu que c'est mon hélico à moi que j'ai : ma maman a même mis une très très grosse étiquette avec mon nom écrit dessus sur le côté pour pas que je l'échange sans faire gaffe avec celui des copains qui ont le même".)
- Peut-on tout à fait changer complètement son plan de vol en plein milieu de l'espace aérien d'une grande ville américaine juste pour épater de la gonzesse ? C'est vrai qu'aux States depuis le 11 Septembre, les autorités ont tendance à avoir beaucoup d'humour avec les trucs qui volent plus ou moins près des buildings (et là, Scud dans la gueule à l'hélico à Cricri, fin du film)... D'ailleurs, en Europe, le dernier qui a fait ce genre d'action de merde s'appelait Francesco Schettino et il barrait le Costa Concordia avec toute la réussite qu'on lui connaît.
- suis-je la seule à avoir envie de lui repondre, lorsqu'elle s'attable devant un bouteille et une enveloppe craft et qu'elle demande "qu'est-ce que c'est ?" : "ben du vin, gourdasse !" ? (D'ailleurs, pour quelqu'une qui, contractuellement, n'aurait pas le droit de picoler, c'est fou ce qu'il peut la faire boire !)
- quelle est la nana qui a eu un quintuple orgasme quand elle a perdu sa virginité ? Sans déconner, qui ?!?
- un mec, auto-proclamé handicapé de toute relation sentimentale et abonné aux plans cul sous contrat, présentera-t-il donc sans aucune hésitation la jeune fille qu'il vient à peine de dépuceler à sa mère ?
- faut-il nécessairement s'appeler Grey pour exercer la médecine dans la ville de Seattle ?
- un type (avec qui tu as couché une fois et qui te harcèle pour que tu signes un contrat qui fera de toi son esclave sexuelle) rentre chez toi alors que tu es seule dans ton appart et qu'à priori tu avais fermé la porte à clé ? Pas de problème, ça n'est pas du tout flippant, c'est même tellement romantique que "oui, prends-moi là tout de suite" (bah oui quoi : il a apporté du pinard et des verres à vin... Verres avec lesquels il repartira comme il est venu (il doit être à 2 ou 3 ballons près le pauvre bougre) puisque plus tard dans le film, ils boiront le champagne post-remise des diplômes dans ce même appartement mais dans des mugs... Bon ok ce sont des tasses à thé en vrai).
- Est-ce que quand Christian et son air de stalker fou insiste lourdement une nouvelle fois pour qu'Ana signe son putain de contrat (là, devant tout le monde, sur une estrade, en lui serrant la main lors de la remise des diplômes) vous n'avez pas eu l'impression qu'il avait tenté le coup avec toutes les gonzesses précédentes dans l'ordre alphabétique, jusqu'à ce qu'il y en ait une qui craque et qui cède ?
- déjà un mec qui te pique ton p'tit dej un lendemain de cuite c'était pas crédible, mais alors un type, toujours le même, celui qui te harcèle entre 2 coïts, qui te vend ta coccinelle de collection derrière ton dos pour t'acheter une bagnole neuve... Non mais WTF ?!???!
- suis-je la seule à avoir trouvé complètement effrayant (comme dans le livre du reste) le fait qu'il la traque jusque chez sa mère en Georgie en fliquant ses consommations de cosmopolitans via SMS, ou c'est vraiment trop mignon ?
- d'où sort-elle ce putain de MacBook (Apple a accepté le placement produit contrairement à Blackberry, puisqu'elle passera le film avec son vieux téléphone à pile à galène tout moisi contrairement au bouquin) qu'il lui a offert et qu'elle lui rend à la fin ? L'avait-elle caché dans son anus pour le passer en douce dans l'appartement de Cricri ?
Enfin, parlons juste 2mn des acteurs.
Elle, tout d'abord, s'en sort plutôt bien (si on ne compte pas le nombre INCALCULABLE de fois où elle se mordille les lèvres ou qu'elle suce Christian Grey... Enfin le crayon gris avec son nom marqué dessus quoi... Subtilité quand tu nous tiens) avec ses yeux de faon mi-innocent mi-mutin et son physique de girl-next-door (même si ça n'est pas non plus une totale inconnue au bataillon vu que, derrière sa frange coupée au taille-haie rouillé, elle reste un tout petit peu la fille de Melanie Griffith et Don Johnson), nécessaire à l'identification des spectatrices (exception faite qu'elle est ultra bien gaulée, elle... Même si c'est pas son cul. Bah oui).
Mais lui... Lui ! Alors oui, il est plastiquement parfait, faut pas déconner (marmoréen qu'elle aurait dit la Stephenie Meyer) mais il a vraiment le charisme d'un poulpe avec ses 3 expressions faciales et son regard de tueur en série (un poulpe tueur quoi. Si si, ça existe : la preuve).
Mais c'est aussi peut-être parce que j'aurais préféré voir Charlie Hunnam (initialement prévu au casting) tout nu (ben quoi ?)...
Et puis sans plaisanter, dans un film basé sur du cul, si vous voulez voir une alchimie entre deux acteurs, autant choisir des gens qui potentiellement peuvent vivre une vraie histoire de fion dans la vraie vie (genre, si on veut rester dans des ref qui ont le même public-cible, Kirsten et Robbie dans Twilight ou Emma et Andrew dans Spiderman, des gens dont on sent vraiment qu'il peut y avoir un truc plausible entre eux ou un dérapage incontrôlé).
Ou bien engagez des gens qui savent jouer la comédie... Ou des gens qui savent feindre les sentiments (voilà, c'est ça : engagez des sociopathes).
Évitez donc de caster un type heureux en ménage qui vient de se marier et d'avoir un bébé (ceci n'empêche bien sûr pas cela mais autant mettre toutes les chances de votre côté et là pour le coup c'est foiré et ça se voit).
Alors non, je n'ai pas spécialement eu envie de me faire latter le fessier à grands coups de pelle à pizza après la projection (pas pour donner dans le cliché italianophobe mais plutôt pour adapter la taille de l'instrument à celle de mon séant), comme à la lecture du roman du reste. Et même si on a bien rigolé, ça ne vaut vraiment pas le prix d'une place de ciné. Mais ça peut faire l'objet d'une bonne soirée Divx entre copines (ou DVD donné en cadeau avec le plein d'essence : ça ne vaut pas non plus le coup de risquer de recevoir la lettre d'avertissement d'Hadopi).
PS : allez, une dernière chose qui me chiffonne pour la route (à moins que je ne sois tombée dans une sorte de micro-coma ou que je n'ai été victime d'une légère rupture d'anévrisme en cours de projection) : à un moment donné, Cricri présente Ana à sa mère donc (le genre qui rentre chez toi comme dans un moulin sans être invitée). La-dite mère annonce "je vais organiser un repas la semaine prochaine parce que ta sœur Mia rentre de Paris". 45mn plus tard dans le film environ (je n'ai pas vraiment compté, mais ça m'a semblé une éternité) Ana se réveille et revêt les beaux habits que Cricri a laissés pour elle à côté du plumard (une robe rose saumoné qu'elle, elle la porte et ça lui va nickel mais que toi tu la mets et tu ressembles à un jambon périmé). Elle demande alors à Cricri pour quoi que c'est faire ces jolis atours. Et il lui dit : "ben tu te souviens pas, sombre conne, on va bouffer chez ma mère". Et là, faille spatio-temporelle, portail de téléportation, accélération de l'espace-temps : donc en gros vous voulez dire qu'en l'espace d'une semaine, la Ana a eu le temps de trouver un appart, d'empaqueter tout son bordel, de déménager à Seattle tout en soutenant sa thèse puis d'assister à sa remise des diplômes, le tout en faisant languir le Cricri avec ses nombreuses réticences à signer son putain de contrat ? Alors de deux choses l'une : Soit il est vraiment très impatient, soit y'a une couille dans le potage (et en terme de potage, je ne parle bien sûr pas d'Ana mais du scénario)...
À suivre...
Pour lire le résumé du film CINQUANTE NUANCES PLUS SOMBRES de James Foley :
De la critique hystérique (mais pas que)
Comme Anastasia la courgette l'a largué avec perte et fracas à la fin du précédent film parce qu'elle n'a que très moyennement apprécié la fessée à coups de ceinture qu'elle avait pourtant réclamée ("touche pas le four ptite conne, tu vas te brûler"), Cricri fait des cauchemars avec un filtre vintage aux contours flous pour nous montrer subtilement que c'est à la fois un rêve mais aussi le passé.