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LA JOIE DE VIVRE d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre]

Résumé anti-pédagogique par chapitre.

Chapitre Un.

Quatre ans et demi et des brouettes après la fin du Ventre de Paris, Lisa Macquart meurt. Six mois plus tard, c’est au tour de son mari Quenu :

le sang l’étouffait ; toujours, il portait la main à son cou, comme pour ôter sa cravate ; enfin, un soir, on l’a trouvé la figure violette, le nez tombé dans une terrine de graisse… Son oncle Gradelle était mort ainsi.

🎶 C’est l’histoire de la viiiiiiie !!! Le cycle éterneeeeeeel !!!!! 🎶

Ce sont donc la soeur et le beau-frère de Quenu, les dénommés Chanteau, qui récupère la charge, moyennant compensation financière, de la petite orpheline, Pauline, 10 ans.

Ils vivent au bord de la mer, en Normandie et Chanteau, un ancien industriel du bois, est maire de son patelin, le bien nommé Bonneville (un peu comme dans Mais qui a tué Pamela Rose ?).

Il a la goutte, sa femme est une ex-instit qui possède le même sac qu’Hermione Granger tant il y a du bordel dedans et leur fils, Lazare, 19 ans, ne vit que pour la musique. Ils ont également une bonniche, Veronique, moyennement commode.

Le roman commence lorsque Pauline arrive avec sa tante dans son nouveau foyer, sous une tempête à tout casser. La charcuterie a été vendue à un très bon prix et Pauline touchera un gros paquet de blé à sa majorité.

Chapitre Deux.

Pauline se révèle mature, raisonnable et moultitache : elle est à la fois garde malade pour son oncle pendant ses crises de goutte, un peu comme ces gamins flippants de films d’horreur qui ont le Shining, et une conseillère d’orientation pour son cousin de neuf ans son aîné, avec lequel elle batifole un peu comme dans une pub pour « Belle des Champs », un film de Sofia Coppola (pléonasme), le générique de « La petite Maison dans la prairie »  ou, pire, l’épisode II de Star Wars.

LA JOIE DE VIVRE d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre]

Elle découvre avec lui les joies de la vie au bord de la mer sans aucune trace de pédophilie incestueuse (étonnamment) et teste les limites de son système digestif.

(...) sans parler de la pêche, des moules mangées sans pain, toutes crues (...)

Louise, une gamine d’à-peu-près le même âge que Pauline, fille d’amis de la famille Chanteau, vient passer ses vacances à Bonneville et foutre accessoirement le bordel entre Lazare et Pauline. Et Veronique, la bonniche qui ne peut pas saquer Pauline, a bien compris qu’elle était jalouse de Louise, plus raffinée, mieux élevée, plus délicate bien que moins jolie.

Lazare de son côté, ne voit strictement rien, tout obnubilé qu’il est par sa propre personne. Il décide d’ailleurs d’abandonner la musique et de se lancer corps et âme dans des études de médecine.

Pauline grandit, a ses règles et sa tante qui est pourtant censée l’instruire la maintient dans l’ignorance. Du coup elle potasse en cachette les bouquins d’anatomie et de pathologies que son cousin n’a pas emportés à Paris, parce que f*ck l’éducation lacunaire !

Lazare revient, abandonne médecine et manifeste l’envie de se lancer dans la flore aquatique. Pauline décide de lui prêter le fric pour qu’il monte sa boite d’algoculture et devient son associée. Associée que, parallèlement Lazare a trouvé drôlement changée depuis son retour à Bonneville.

Chapitre Trois.

Pauline is back to the Friendzone !

Peu à peu, de nouveau, la femme disparaissait, il vivait près d’elle comme en compagnie d’un garçon, d’un frère cadet dont les qualités le touchaient chaque jour davantage.

Elle est gentille, elle est serviable, elle a du fric, et comme c’est un personnage à-peu-près positif d’un roman de Zola, elle va forcément finir par se faire baiser la gueule.

Etant donné le pacte financier qui lie désormais les deux jeunes gens, la mère Chanteau décide de les fiancer, histoire que Lazare n’ait pas à rembourser à Pauline les sommes avancées. Ils se marieront donc, mais pas avant deux ans, le temps que Pauline atteigne l’âge canonique de 18 ans et que sa tante puisse lui bouffer tout son pognon. En effet, cette dernière pique de plus en plus dans la caisse en se déculpabilisant puisque Lazare va faire fortune et rembourser Pauline (alors que cela ne devrait pas être nécessaire puisqu’ils sont censés se marier). Soit « de l’art de s’auto-absoudre quand on fait salement de la merde »...

Mais le problème c’est qu’au bout d’un moment, inconsciemment peut-être, la tante commence à s’en vouloir. Alors, comme elle aussi c’est une personnage de Zola et qu’elle se doit d’être irrémédiablement veule et lâche, elle retourne, fort logiquement, sa colère contre la personne-même qu’elle est en train de consciencieusement dépouiller :

Pauline, qui avait d’abord tâché de se défendre, l’écoutait maintenant sans une parole, le cœur gros. Depuis quelque temps, sa tante l’aimait de moins en moins, elle le sentait bien.

Elle ne pouvait plus la piffrer oui !

Le projet d’algoculture se casse la gueule, Lazare se remet à la musique et il se rapproche dangereusement de Pauline à qui ça ne déplairait pas non plus de prendre un peu d’avance sur leur futur mariage.

Mais Lazare, lors d’un repas familial, raconte qu’il a rencontré Louise par hasard et qu’il l’a trouvée fort gouleyante. Sa mère s’empresse alors d’expliquer qu’elle a appris que la jeune fille allait recevoir 200 000 balles de dote, parce que la première gifle morale n’était sans doute pas suffisamment forte pour sa nièce. Et en effet : Pauline a bien les boules parce que, bon, même si elle doit toujours épouser son cousin, y’a rien de gravé dans la roche non plus.
 

Alors, de façon pourtant incroyablement désintéressée, elle continue à supporter Lazare. Lazare qui a de grosses bouffées d’angoisse, Lazare qui est terrifié par l’idée de mourir un jour, Lazare qui alterne les crises d’euphorie et les périodes de découragement à la limite de l’auto-flagellation, Lazare qui est égocentrique, Lazare qui est inconséquent, Lazare qui est capricieux, Lazare qui se moque éperdument de ce que peuvent ressentir les autres, Lazare qui ne réfléchit ni avant de parler ni avant d’agir, Lazare qui se plaint, Lazare qui geint, Lazare qui se morfond, Lazare qui est chiant, Lazare qui a peur de la mort, de l’avenir, de son ombre, d’à-peu-près tout... Bref, Lazare qui est totalement et désespérément dépressif.

Et pendant ce temps, sa tante a toujours besoin d’argent et pourtant, Pauline ne voit toujours rien venir.

On avait déjà mangé près de cent mille francs, sur les cent quatre-vingt mille francs de Pauline. (...)
– Décidément, cette enfant est avare, c’est un vilain défaut, dit enfin la mère. Je n’ai pas envie que Lazare se tue de fatigues et de contrariétés.

Pardon mais cette horrible femme m’a fait vomir dans ma bouche.

Au bout d’un moment et à force d’un peu trop se servir, elle se met à flipper que Saccard, subrogé-tuteur et oncle à la mode de Bretagne de Pauline qui refait surface au bout de quasiment 8 ans, vienne leur demander des comptes. Alors elle décide de renoncer au tutorat de sa nièce et le refourgue au docteur Cazenove, le toubib local. Elle en profite également pour semi-émanciper Pauline, qui a désormais 18 ans, en lui refilant la gestion du pognon qui lui reste, soit 75 000 francs sur les 180 000 de départ.

Les Chanteau avaient payé, leur gaieté revenait.

Et pendant ce temps Veronique, la bonniche, qui a tout entendu, trouve quand même ça un peu abusé de la part de ses patrons d’avoir si honteusement spolié leur nièce, qu’elle ne peut pourtant pas blairer.

– Ils lui en ont mangé la moitié, ma parole ! grondait-elle furieusement. Non, ce n’est pas propre… Bien sûr qu’elle n’avait pas besoin de tomber chez nous, mais était-ce une raison pour la mettre nue comme un ver ?… Non, moi je suis juste, je finirai par l’aimer, cette enfant !

Ou pas.

Chapitre Quatre.

Louise débarque pour passer deux mois d’été chez les Chanteau. Elle félicite Pauline pour son futur mariage prévu le mois suivant mais la jeune fille la détrompe, expliquant qu’il n’en est pas question avant l’automne, date lancée en l’air par Madame Chanteau histoire de faire semblant que le projet est toujours d’actualité alors qu’elle n’a plus du tout envie de marier son fils à sa nièce, rapport au fait qu’elle n’a quasiment plus d’argent.

Euh... La faute à qui, grosse pétasse ?!?

Lazare a un nouveau projet à la con : sauver le village de pêcheurs de la houle et de l’érosion. Mais pour ça il a évidemment besoin d’argent : 12 000 balles.

Et qui c’est qui va bien pouvoir mettre la main à la poche ?!? Pauline, évidemment !!!! En effet, Lazare va plaider la cause de son projet auprès du préfet pour obtenir des subventions. Mais naturellement, comme il est absolument incapable de gérer sa frustration et d’attendre la response de l’administration, il se met à dépérir. Et encore plus naturellement, c’est Pauline qui finit par raquer, cédant à ce chantage affectif involontaire :

Qu’importait cet argent jeté à l’eau, s’il y avait une seule chance de sauver le village ? Et elle s’endormit au jour, en pensant à la joie de son cousin, tiré de ses tristesses noires, mis enfin peut-être sur sa véritable voie, heureux par elle, lui devant tout.

Oui, bon, ok, les bonnes actions désintéressées n’existent pas.

Parallèlement, comme elle n’était pas suffisamment dévouée pour son prochain, Pauline invente le CCAS et ses petites raclures de pauvres profitent inévitablement de sa gentillesse en la manipulant et en lui en demandant toujours plus. Et elle, trop bonne et trop conne, est trop contente.

Ambiance :

– (...) des gens riches, ces Houtelard, les seuls pêcheurs riches de Bonneville. (...) Seulement, une avarice épouvantable, une vie de chien dans une saleté sans nom. Et le pis est que le père, après avoir tué sa femme de coups, a épousé sa bonne, une affreuse fille plus dure que lui. Maintenant, à eux deux, ils massacrent ce pauvre être. (...)

Celle-ci était la fille de Prouane, le bedeau. (...) couverte de scrofules, d’une maigreur ardente, avec de gros yeux à fleur de tête, où l’hystérie flambait déjà. Elle avait onze ans et en paraissait à peine sept. Les Prouane n’avaient pas de barque (...). Mais, grâce à la place de bedeau, ils auraient encore mangé du pain tous les jours, sans leur ivrognerie. On trouvait le père et la mère en travers des portes, assommés par le calvados, la terrible eau-de-vie normande ; tandis que la petite les enjambait, pour égoutter leurs verres. (...)
Puis, arriva le tour d’un grand garçon de douze ans, le fils Cuche, un galopin efflanqué, maigre de vices précoces. (...)

C’était encore une vilaine histoire. Après la destruction de sa maison, Cuche avait quitté sa femme, pour s’installer chez une cousine ; et la femme, aujourd’hui, réfugiée au fond d’un poste de douaniers en ruine, couchait avec tout le pays, malgré sa laideur repoussante. On la payait en nature, des fois on lui donnait trois sous. Le garçon, qui assistait à cela, crevait la faim.

Vas-y Émile ! Donne tout !

– Une famille de voleurs qui ne vit que de rapines ! Le père aide à la contrebande, la mère ravage les champs de Verchemont, le grand-père va la nuit ramasser des huîtres à Roqueboise, dans le parc de l’État… Et vous voyez ce qu’ils font de leur fille : une mendiante, une voleuse qu’ils envoient chez les gens pour rafler tout ce qui traîne…

Du coup, comme elle voit ce défilé hebdomadaire misérable d’un mauvais œil (et rien à voir avec l’argent que Pauline y consacre), cette salope de mère Chanteau s’emporte :

– Si tu es maintenant maîtresse de ta fortune, je ne puis pourtant pas te laisser ruiner si bêtement. J’ai une responsabilité morale… Oui, ruiner, ma chère, et plus vite que tu ne crois !
Véronique (...) reparut en criant brutalement :
– Voilà le boucher… Il veut sa note, quarante-six francs dix centimes.
Un grand trouble coupa la parole à madame Chanteau. Elle se fouilla, eut un geste de surprise. Puis, à voix basse :
– Dis donc, Pauline, as-tu assez sur toi ?… Je n’ai pas de monnaie, il me faudrait remonter. Nous compterons.
Pauline suivit la bonne, pour payer le boucher.

Voilà, voilà... J’ai revomi.

La mère Chanteau méprise de plus en plus sa nièce à mesure que le fric disparaît et lorgne chaque jour davantage vers Louise et ses 200 000 balles.

Le toubib renonce à son rôle de curateur :

– Mon enfant, dit-il en prenant Pauline à l’écart, je ne veux plus être votre complice. Cessez de me consulter, ruinez-vous selon votre cœur… Vous savez bien que jamais je ne résisterai devant vos supplications ; et, vraiment, j’en souffre ensuite, j’en ai la conscience toute barbouillée… J’aime mieux ignorer ce que je désapprouve.

On va dire que c’est bienveillant... Lâche, mais bienveillant.

Pauline, qui en plus de subvenir plus ou moins aux besoins de tout le monde, a décidément une vie de merde, se retrouve à veiller sur son oncle pendant une crise de goutte de 15 jours (ce qui constitue tout de même une grosse crise de goutte).

Et pendant ce temps, Lazare la remplace par l’exaspérante Louise qui ne supporte pas grand-chose et encore moins les cris de douleur du patriarche qui écorchent ses frêles oreilles et lui font peur. Et même si elle est moins belle que Pauline, elle est aussi moins brute de décoffrage, plus gracieuse, plus chiante et plus niaise et elle représente ainsi un fantasme tout désigné.

Du coup, quand Pauline revient dans le game, elle est à nouveau friendzonée.

Un beau jour de temps pourri, ils s’en vont tous les trois observer les premiers tests de constructions pour arrêter la mer :

[Louise] parut faire un faux pas, sur la terre détrempée, et Lazare, courant à elle, lui offrit de la soutenir. Pauline dut les suivre. (...) ses regards soupçonneux remarquaient que le coude de son cousin frôlait d’une continuelle caresse la taille de Louise. Bientôt, elle ne vit plus que ce contact, tout disparut (...). Il avait ouvert son parapluie au-dessus de la tête de Louise. Cette dernière, d’un air de tourterelle frileuse, se serrait davantage contre lui. Et Pauline, oubliée, les regardait toujours, prise d’une rage sombre, croyant recevoir au visage la chaleur de leur étreinte.

Définition en contexte de l’expression « tenir la chandelle ».

Pauline, trempée et vexée, chope une grosse crève, tellement grosse qu’elle nécessite la venue de l’ancêtre de SOS médecin en pleine nuit. Et en attendant que la bonne revienne avec le toubib, Lazare reste auprès d’elle, paniqué et étrangement à nouveau concerné :

Si elle ne pouvait sourire, elle voulait lui faire comprendre qu’elle avait entendu, qu’elle était bien touchée de le savoir là, seul avec elle, ne pensant plus à une autre.

Pauline agonise presque, alors sa tante, dans sa grande bienveillance magnanime, vient lui piquer du fric tout en se plaignant à son fils :

– (...) Si Pauline seulement n’allait pas si mal, elle nous avancerait les quatre-vingt-dix francs de sa pension. Nous sommes au vingt, ça ne ferait jamais que dix jours… La pauvre petite paraît bien faible… (...) Tu ne sais pas où elle met son argent ?

Bon finalement l’abcès de son angine finit par crever au bout de trois semaines de souffrances atroces (que ceux qui n’ont jamais fait d’angine lui jettent la première boite d’amoxicilline) et elle commence à guérir. Alors Lazare, qui s’était exceptionnellement mis de côté pendant tout ce temps, se prend en pleine poire son naturel, qui revient au galop.

Chapitre Cinq.

Pauline se remet doucement et la mère Chanteau n’en finit pas de réécrire l’histoire à sa sauce et de dégueuler sur sa nièce auprès de sa petite chouchoute friquée :

(...) jamais son fils ne se serait embarqué dans cette stupide exploitation des algues, jamais il n’aurait perdu son temps à vouloir empêcher la mer d’écraser Bonneville, sans cette Pauline de malheur qui lui tournait la tête. (...)
elle exécrait Pauline, de tout l’argent qu’elle lui devait.

On était plus ou moins arrivés à cette conclusion.

Et de faire l’article de son fils à Louise pour induire en elle l’envie de l’épouser, exprimant désormais clairement sa répugnance à l’idée que ce soit Pauline (et ses pauvres 60 000 balles) qui devienne sa belle-fille.

De son côté, Pauline n’en finit plus de s’en remettre. Et maintenant qu’elle est sortie d’affaire, elle intéresse nettement moins Lazare, qui s’emmerde sec. Alors elle l’envoie prendre l’air prétextant que si les premiers essais de digue artificielle ont été un succès, il faudrait peut-être continuer pour que ce ne soit pas vain. Mais...

(...) Lazare n’avait déjà plus son coup d’enthousiasme ; se montrait mécontent de l’assemblage sur lequel il comptait, des études nouvelles étaient nécessaires ; enfin, on dépasserait le devis, et le conseil général n’avait pas encore voté un sou.

Pauline insiste, encore moyennant finance, et Lazare finit par s’y remettre. Mais comme elle est aussi un peu maso (en plus d’être atteinte de générosité pathologique), elle le pousse à embarquer Louise avec lui, car la pauvresse s’emmerde, elle aussi (puisque Lazare l’a délaissée en restant au chevet de Pauline lorsqu’elle était malade).

Et c’est comme ça que, pas tout à fait remise, Pauline se retrouve à nouveau à veiller sur son oncle nuit et jour (puisque personne ne veut s’y coller) pendant que son futur époux batifole avec sa rivale (que plus ou moins tout le monde pousse plus ou moins sciemment dans ses bras).

Pauline finit donc par les surprendre, sur une gaffe de Veronique qui n’en peut plus de la savoir le dindon de la farce, en train de se galocher, avec la bénédiction de sa tante.

S’ensuit une grosse scène d’hystérie où Pauline secoue Louise comme un prunier puis la ramène à sa chambre littéralement à coups de pied au cul pour qu’elle fasse ses valises. Madame Chanteau s’interpose et prend la défense de son potentiel futur (mais en tout cas fortement désiré) portefeuille. Alors c’est Pauline qui se décide à partir. Veronique intervient après s’être fightée avec sa patronne et finalement la mère Chanteau cède et emmène Louise chez sa tante.

Lazare se sort les doigts du cul et fait subitement preuve d’un accès de courage et de responsabili... Mais non, je plaisante : Lazare se met à chialer comme une merde ! Et Pauline retourne auprès du malade.

Chapitre Six.

La vie reprend son cours normal et hypocrite. Lazare n’a pas les couilles de venir demander pardon à Pauline pour la bonne et simple raison qu’il a toujours envie de se taper Louise, devenue sa nouvelle obsession... Cela-dit, étant donné qu’il rate et laisse tomber absolument tout ce qu’il entreprend, Pauline ne devrait pas avoir trop de souci à se faire.

Comme parfois, même chez Zola, il y a une justice, la mère Chanteau tombe gravement malade. Lazare panique totalement à l’idée de perdre sa mère et qui c’est qui va se coltiner le rôle de garde-malade ? Pauline, bien sûr !!! Pauline qui cherche définitivement une canonisation de son vivant.

Au bout d’un moment (rapidement en fait), Véronique n’y tient plus : elle balance à Pauline tout ce que sa tante a manigancé derrière son dos, le pognon qu’elle lui a volé sans scrupule, Lazare qu’elle a survendu à Louise, toute la haine et le mépris qu’elle éprouve pour elle et qu’elle chante sur tous les toits. Pauline encaisse et retourne s’occuper vaillamment de la malade. Malade qui planque sous son lit les médicaments qu’elle lui donne par crainte que sa nièce ne l’empoisonne. Pauline s’en rend compte, se prend un énième coup de latte moral en pleine poire mais prend sur elle, encore et encore :

Navrée, la jeune fille devait se tenir à distance ; et elle chancelait de fatigue et de chagrin, elle succombait de bonté impuissante.

Sa tante lui crache les médocs à la gueule (ou par terre, c’est - presque - pareil), et part complètement en couille :

– Si tu crois que je ne le sens pas ! Tu mets du cuivre et du vitriol dans tout… C’est ça qui m’étouffe. Je n’ai rien, je me serais levée ce matin, si tu n’avais pas fait fondre du vert-de-gris dans mon bouillon, hier soir… Oui, tu as assez de moi, tu voudrais m’enterrer. Mais je suis solide, c’est moi qui t’enterrerai. (...)
Eh bien ! c’est ce que tu veux, n’est-ce pas ? Va, je te connais, ton plan est arrêté depuis longtemps, tu es entrée ici dans l’unique but de nous assassiner et de nous dépouiller. Ton idée est d’avoir la maison, et je te gêne… Ah ! gueuse, j’aurais dû t’écraser le premier jour… Je te hais ! je te hais !

Du coup, Pauline est complètement en route pour la béatification :

Tout se noyait au fond d’une pitié immense, elle aurait voulu pouvoir aimer davantage, se dévouer, se donner, supporter l’injustice et l’injure, pour mieux soulager les autres.

Je

Pendant ce temps, Lazare reste assis dans la cuisine à regarder dans le vague en réfléchissant au sens de la vie et en comptant ses dents avec sa langue.

La mère Chanteau finit par crever dans une scène d’agonie digne... ben de Zola en fait. Elle repasse à voix haute sans discontinuer le film de sa jeunesse puis elle pète à nouveau les plombs, se cachant dans les bras de sa nièce qu’elle ne reconnaît plus et qu’elle accuse toujours de l’avoir empoisonnée.

Chapitre Sept.

Pauline et Lazare partent enterrer la mère Chanteau à Caen (dans le caveau familial, pas au fond des bois avec une pelle). Lorsqu’ils reviennent c’est sous la même tempête que lorsque Pauline était arrivée à Bonneville, quand sa tante était encore sympa (et vivante).

Les alcoolos analphabètes et libidineux de villageois sont tout contents de voir la mer démonter les digues de bois dans lesquelles Lazare a englouti une bonne partie de ce qui restait de l’héritage de Pauline. Lazare a les boules et du coup ça lui en touche une sans réveiller l’autre d’apprendre que la moitié des baraques du village a été engloutie par les flots ce jour-là, en même temps que ses installations qui étaient censées les protéger.

A cause du deuil et du désœuvrement, Lazare nous fait une grosse déprime (encore plus grosse que d’habitude quoi). Il devient pote avec le curé mais il tire quand même tout le temps la gueule. 

Véronique fait machine arrière et ne peut plus saquer Pauline à nouveau, revenant ainsi dans la team de feu madame Chanteau, le club des détesteuses de Pauline. 

Cette dernière devient maîtresse de maison, illumine le quotidien de sa jeunesse et de son caractère optimiste et joyeux... sauf celui de Lazare qui s’enterre et se complaît dans son marasme et ses névroses.

Au fond du regret de sa mère, il y avait chez lui une recrudescence de l’épouvante de la mort.

Plus personne ne réparle du mariage entre Pauline et Lazare pour l’instant, tout le monde se retranchant derrière la période de deuil qui n’est pas encore passée.

Lazare sombre de plus en plus dans sa dépression. Il est d’ailleurs tellement terrorisé par la mort qu’il en développe des TOCS. Il devient également insomniaque et ne dort plus que le jour.

De temps en temps, il aide Pauline à recevoir les pauvres mais ça le gave. Pauline flippe de plus en plus de le perdre et redouble d’efforts pour faire pousser des licornes, des arcs-en-ciel et des papillons dans la maison :

elle tâchait de retrouver l’orgueil de son abnégation, en jurant encore de faire assez de joie autour d’elle, pour suffire au bonheur de tous les siens.

Le chien de Lazare, son compagnon de toujours, meurt dans une flaque de sang causée par une hémorragie rénale et la deuxième (épouvantablement déchirante et réaliste) description d’agonie du bouquin (ce qui, même pour Zola, représente une bonne moyenne). Du coup Lazare déprime encore davantage et Pauline a d’autant plus l’impression de ne servir à rien.

Chapitre Huit.

Après que trois nouvelles maisons sont emportées par la mer, Lazare, qui est bien conscient que son oisiveté ne fait qu’amplifier sa dépression et ses obsessions, se remet au boulot pour reconstruire et améliorer ses digues en bois. Le projet est à nouveau financé par Pauline, ce qui l’arrange bien parce qu’elle n’était pas très jouasse à l’idée de le voir partir fonder un journal à Caen (est-il nécessaire de rappeler l’inexistence des bonnes actions désintéressées ?).

Lazare obtient enfin la visite de son chantier par un ingénieur de Caen, un type charmant qui reste déjeuner chez les Chanteau et qui drague ouvertement Pauline. Type charmant qui démonte le projet dans son rapport ce qui fait que Lazare n’emporte pas les subventions pour rembourser sa cousine.

Cependant, quand le charpentier envoya son mémoire, elle ne put réprimer un geste de surprise douloureuse : les quatre mille francs du devis montaient à près de huit mille. En tout, elle avait jeté plus de vingt mille francs dans ces quelques poutres, que la première tempête pouvait emporter.

Pauline, devenue majeure, devient la maîtresse de maison officielle (rôle qu’elle tenait déjà plus ou moins officieusement depuis un petit bout de temps) et c’est à elle qu’incombe la gestion du budget (ce qui plait moyen à Veronique).

Elle est également de retour dans la friendzone puis dans la brozone car Lazare se met carrément à ne plus la supporter comme si c’était sa sœur. Faut dire que le bougre a retrouvé dans le bordel de sa chambre un gant oublié par Louise avant de se faire vider par Pauline et qu’il passe désormais son temps à se palucher en le sniffant puis en se sentant dégoûté de lui même, pour mieux recommencer une demi-heure après.

Alors Pauline s’efforce de continuer de remplir la maison de gaieté le jour et chiale toutes les nuits... Au point de projeter de ramener Louise pour rendre son cousin heureux, dans une sorte de prophétie auto-réalisatrice visant à carrément provoquer ce qu’elle redoute le plus :

qu’importait sa souffrance, pourvu que les êtres aimés fussent heureux ! (...) La seule vue de Lazare la rendait à son combat. Il mangeait silencieusement, las déjà de cette nouvelle journée qui commençait ; et elle ne trouvait plus la force de le donner à une autre. L’idée qu’une autre le prendrait, le baiserait pour le consoler, lui était insupportable.

Alors les nuits de Pauline gangrènent peu à peu ses jours et elle en devient désagréable, ce que ne manque pas de lui faire remarquer Veronique qui a définitivement retourné sa veste à la mort de sa patronne. Alors Pauline se résigne :

(...) la jeune fille, dans les dernières secousses de sa jalousie, se demanda si elle avait le droit d’imposer à Lazare son bonheur à elle. Certes, elle le voulait heureux avant tout, même au prix de ses larmes. Pourquoi donc l’enfermer ainsi, le forcer à une solitude dont il paraissait souffrir ? Sans doute, il l’aimait encore, il lui reviendrait, quand il la jugerait mieux, en la comparant à l’autre. En tout cas, elle devait lui permettre de choisir : c’était juste, et l’idée de justice restait en elle debout, souveraine.

Elle ramène donc Louise à Bonneville, ce qui surprend tout le monde et fout une gros malaise. Pauline en est même rassurée parce que Lazare évite sa rivale. Elle en vient même à se tirer une balle dans le pied en le suppliant d’être moins raide avec Louise. Mais au bout d’un moment...

Et ce fut alors, insensiblement, que Louise le reprit tout entier. Il s’accoutumait, osait lui donner le bras, se laissait pénétrer de nouveau par cette odeur troublante, que le moindre bout de ses dentelles exhalait. D’abord, il lutta, il voulut s’éloigner, dès qu’il sentit monter l’ivresse. Mais sa cousine elle-même lui criait d’aider la jeune fille, le long des falaises, lorsqu’ils avaient un ruisseau à sauter ; et elle sautait gaillardement, en garçon, tandis que l’autre, avec un léger cri d’alouette blessée, s’abandonnait entre les bras du jeune homme. Puis, au retour, il la soutenait, leurs rires étouffés, leurs chuchotements à l’oreille recommençaient.

Rien encore n’inquiétait Pauline, elle gardait son allure brave, sans comprendre qu’elle jouait son bonheur, à n’être pas lasse et à n’avoir pas besoin d’être secourue. L’odeur saine de ses bras de ménagère ne troublait personne.

Cependant, comme elle leur a donné sa confiance, Lazare et Louise luttent pour ne pas la trahir, redoublant d’attentions pour elle, leur loyauté outrée devenant peu à peu une véritable torture pour Pauline. Mais lentement, Pauline se rend à l’évidence : même s’ils sont promis l’un à l’autre, elle ne peut épouser Lazare en sachant qu’il en aime une autre.

Lazare abandonne successivement ses nouveaux projets de littérature et de professorat pour se tourner vers la politique. Pauline finit par tomber sur le gant et comprend qu’en faisant venir Louise elle ne procurait pas une diversion à la dépression de Lazare mais elle lui offrait tout simplement l’objet de son désir obsessionnel sur un plateau. Et Veronique qui la surprend en train de chialer sa race de lui balancer :

Dame ! reprit-elle de l’air brutal qu’elle prenait de plus en plus, vous deviez bien vous attendre à ce qui arrive… Je vous avais prévenue autrefois. Vous les remettez ensemble, ils s’amusent… et puis, peut-être que madame avait raison, cette minette-là l’émoustille plus que vous.

Ça a le mérite d’être franc... pas franchement consolateur mais juste franc.

La nuit venue, Pauline est aspirée dans une sorte de vortex où elle hésite entre marier Louise et Lazare et les forcer tous les trois au célibat à vie... Elle retourne le problème dans tous les sens, pèse, repèse le pour et le contre, s’auto-flagelle, se dénigre, s’avoue enfin : son physique et sa manière d’être ne plaisent pas à son cousin et en plus elle n’a même plus de fric pour lui permettre de réaliser ses grands projets d’avenir.

Tout finissait, elle venait de couper les liens de son égoïsme, elle n’espérait plus en rien ni en personne ; et il y avait, au fond d’elle, la volupté subtile du sacrifice. (...)
C’était le degré suprême dans l’amour des autres : disparaître, donner tout sans croire qu’on donne assez, aimer au point d’être joyeux d’une félicité qu’on n’a pas faite et qu’on ne partagera pas.

Elle parle de son projet de mariage entre Louise et Lazare au docteur Cazenove qui, non content de la voir aussi mature et raisonnable, lui offre la possibilité de refaire sa vie à Saint-Lô en devenant la dame de compagnie d’une vieille parente riche.

Elle en parle ensuite à Louise, qui, même si elle renâcle un peu au début pour la forme, accepte.

Elle s’entretient ensuite avec Lazare qui refuse catégoriquement et monte sur ses grands chevaux. Alors, tandis qu’elle s’était résignée, qu’elle avait renoncé à l’amour, qu’elle avait puisé en elle la force nécessaire à ce terrible sacrifice, elle se surprend à espérer à nouveau... sauf que, quelques jours plus tard :

J’ai réfléchi, murmura-t-il. Tu es la meilleure et la plus sage… Mais je t’aime toujours, je t’aime comme j’ai aimé maman.

Pire que la friendzone et la brozone réunies : la motherzone !!!!

Le mariage est célébré à Caen et comme le père Chanteau ne peut pas se déplacer, c’est Pauline qui représente la famille, histoire de boire le calice jusqu’à la lie.

Le soir même, une fois rentrée à Bonneville, elle se dessape dans sa chambre et, une fois nue, prend véritablement conscience de ce que son renoncement implique : tandis qu’elle se retrouve seule, à poil et pleine du sang de sa fécondité inutile, l’autre découvre l’amour dans les bras de celui qu’elle aime et qu’elle n’aura jamais. Alors elle se met à hurler et à pleurer de désespoir dans son oreiller dans un déchirement viscéral de son âme toute entière...

Putain mais à quel moment ça lui a paru une bonne idée à Zola d’appeler son bouquin « La joie de vivre » ?!?

LA JOIE DE VIVRE d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre]

Pauline est censée partir le lendemain pour Saint-Lô pour ne surtout pas vivre sous le même toit que les jeunes mariés. Sauf que son oncle lui met une telle pression à base de bon gros chantage affectif et de crise de goutte (pour laquelle il en remet des tonnes) qu’elle repousse son départ. Et la bonne en remet une couche en annonçant que si Pauline part, elle partira elle aussi pour ne pas se taper les crises du vieux toute seule.

Lazare revient sans sa femme pour expliquer qu’ils s’installent finalement à Paris, et Pauline renonce d’autant plus à s’en aller à Saint-Lô et à avoir une chance de rencontrer d’autres gens et d’avoir simplement une vie.

Chapitre Neuf.

Presque deux ans passent et Pauline fait tourner la maison. Une des gamines de 13 ans à laquelle elle fait l’aumône tous les samedis accouche d’une petite fille de père inconnu (un des gamins du village ou un vieux de passage ? Faites vos jeux, rien ne va plus).

Pauline vit au rythme des lettres de Lazare qui deviennent de plus en plus rares et de plus en plus courtes. Jusqu’au jour où il lui apprend que Louise est enceinte. Quelques temps plus tard, il lui annonce qu’il débarque à Bonneville. Alors Pauline prépare sa valise toujours décidée à ne pas vivre sous le même toit que son cousin et sa femme. Sauf que Lazare arrive seul : Louise termine sa grossesse chez une cousine.

Il s’installe pour quinze jours et Pauline devient sa confidente. Et ce qu’elle redoutait est arrivé : Lazare n’est pas heureux... bon, en même temps, c’est pas comme s’il souffrait d’une forte incapacité au bonheur.

Il a abandonné le monde de la finance (tiens, c’est étonnant !) et souhaite se lancer dans le théâtre. Avec Louise, une fois passée la phase fusionnelle dite du « Youpi on a enfin le droit de baiser », l’angoisse de la mort est revenue le hanter encore plus fort qu’avant : il a non seulement peur de mourir mais il a aussi peur que sa femme meure. Et le pire c’est qu’il a eu la riche idée de partager ses angoisses avec elle, qui a une certaine propension à la dépression également. Ils s’entraînent donc tous les deux vers l’abîme puisqu’au lieu de l’aider, elle a fait siennes ses terreurs existentielles (d’ailleurs, si on a soi-même quelques menues prédispositions à une certaine anxiété irrationnelle, mieux vaut mettre son cerveau en off à la lecture de ce livre).

Un moment, la peur du feu le ravagea, au point qu’il déménagea d’un troisième étage pour descendre habiter un premier, de façon à pouvoir se sauver plus facilement, lorsque la maison brûlerait.

Il va mieux.

Lazare et Pauline redeviennent copains comme cochons et revivent en accéléré les années passées ensemble, les sentiments qui vont avec nettement moins de friendzone.

Lazare sauve un bébé de paysans d’un incendie, faisant étonnamment fi de sa peur de crever, et Pauline reste de plus en plus tard dans sa chambre. Les quinze jours prévus initialement se transforment en six semaines, Lazare ne répond plus aux lettres de sa femme et, au bout d’un moment, il se jette sur sa cousine qui cède puis se débat puis recède puis s’échappe, tous deux restant finalement haletants, prostrés, déboussolés, fous d’envie et de leur presque faute, adossés chacun d’un côté de la porte close de la chambre de Pauline.

Comme ils ne sont pas allés au bout du processus, c’est encore pire : ils brulent de désir l’un pour l’autre, sont complètement amoureux mais se refusent toujours à commettre l’irréparable. Donc ils passent leur temps à se peloter, à se rouler des galoches et à se repousser subitement dans les coins.

Jusqu’au jour où Louise débaroule et décide d’accoucher à Bonneville. Pauline prend (encore) la décision de partir à Saint-Lô, et deux soirs avant son départ, elle roule une torride pelle d’adieu à Lazare.

Chapitre Dix.

Pauline ne part pas (tiens, ça faisait longtemps) parce que Louise accouche et c’est une boucherie terriblement... naturaliste. Un peu comme peut l’être un vrai accouchement, de ceux dont on ne parle pas dans les cours de préparation à la naissance, ce pur moment de bonheur où l’on perd toute notion de temps, de dignité et de pudeur, ces instants féeriques où l’on n’est plus que douleur, peur, odeurs, sang, sueur, urine, merde et impuissance, ce sublime sentiment de crever, de n’être plus qu’un corps, ou plutôt un amas d’humeurs et de chair écartelé par la souffrance. Oh mais attendez... c’est peut-être pour ça qu’on n’en parle pas en fait ! F*ck l’éducation lacunaire mais y’a des limites.

Lazare ne sert pas à grand-chose alors c’est lui qui va chercher la sage-femme puis le docteur parce que la situation pue du cul.

Le docteur tente une version du bébé qui se présente par le bras en essayant à la fois de ne pas en faire de la bouillie et de ne pas faire imploser la mère, et tout être humain, doté d’un utérus ou pas, peut comprendre aussi subitement que violemment le véritable sens de l’expression « empathie sensorielle » à la lecture de ce passage.

Pauline s’acharne pour sauver ce bébé rachitique qui était donné pour mort pendant que le docteur sauve Louise.
Et, aussi incroyable que cela puisse paraître, Pauline renonce à quitter Bonneville.

Chapitre Onze.

Dix-huit mois plus tard. Comme Louise et Lazare font dans l’originalité, leur bébé s’appelle Paul et Pauline est sa marraine, histoire d’être enchaînée pour toujours à cette famille.

Le couple vit désormais à Bonneville où il passe le plus clair de son temps à s’engueuler tandis que Pauline passe le plus clair du sien à les réconcilier, dans un sorte de dévouement touchant à l’abrutissement béat.

Elle s’occupe de Paul comme si c’était son gosse, et Véronique est définitivement revenue à sa haine première de Pauline.

Lazare continue de bouffer le fric de sa femme dans des entreprises hasardeuses et part de plus en plus souvent à Caen où il reste de plus en plus longtemps.

Pauline a donné les deux tiers du pognon qui restaient de son héritage au bébé et continue quand même à faire l’aumône aux pauvres du coin qui se complaisent dans leur crasse, leur stupidité, leur méchanceté et leur misère, et qui sont tous à présent SDF puisque la mer a fini de détruire leur village de pêcheurs.

Lazare revient après avoir découché, il s’engueule avec sa femme et Pauline nage désormais dans un des cercles de l’enfer qu’elle s’est choisi : elle ne partira pas, elle ne se mariera pas, elle élèvera le fils de celle qu’elle ne sera jamais et de l’homme qu’elle aime (et auquel elle ne se sera jamais non plus), se condamnant à rabibocher Louise et Lazare qui se haïssent et se balancent des horreurs (certes justifiées), telle une Pénélope conjugale qui s’évertuerait à réparer le jour ce que d’autres bousillent la nuit, dans une continuelle tentative désespérée et inutile de faire en sorte que son sacrifice n’a pas été vain.

LA JOIE DE VIVRE d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre]

Et pendant que Lazare et Pauline jouent au papa et à la maman avec Paul qui fait ses premiers pas pendant que Louise tire la tronche à l’étage, le vieux Chanteau s’accroche à la vie et Veronique se pend à un poirier, laissant vacante une place de bonniche tout désignée pour Pauline.

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