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LA FORTUNE DES ROUGON d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre] - CHAPITRE 4

Previously dans La Fortune des Rougon Chapitre 1 / Chapitre 2 / Chapitre 3

Chapitre 4.

Antoine Macquart, devenu un soldat alcoolique planqué (son futur fils, Jean, le sera nettement moins) revient à Plassans après la chute de Napoléon 1er (soit en 1815). Il est persuadé qu’une coquette somme l’attend bien au chaud dans l’escarcelle maternelle mais c’était sans compter sur les manigances de son demi-frère aîné :

– Écoutez, lui dit le marchand d’huile qui affecta de ne plus le tutoyer, ne m’échauffez pas la bile ou je vous jette à la porte. Après tout, je ne vous connais pas. Nous ne portons pas le même nom. C’est déjà bien assez malheureux pour moi que ma mère se soit mal conduite, sans que ses bâtards viennent ici m’injurier. J’étais bien disposé pour vous ; mais, puisque vous êtes insolent, je ne ferai rien, absolument rien.

Oh le fils de p... !

Du coup Antoine s’en va trouver le mari de sa sœur, pensant qu’il sera outré de savoir que Pierre a plus que l’intention de spolier les deux enfants illégitimes de sa mère mais... 

Mouret lui dit nettement qu’il s’était habitué à regarder Ursule comme une orpheline, et qu’il ne voulait, à aucun prix, avoir des démêlés avec sa famille. Les affaires du ménage prospéraient. 

Alors...

– Prenez garde, ma sœur a toujours été chétive, et je l’ai trouvée bien changée ; vous pourriez la perdre.
Les larmes qui montèrent aux yeux de Mouret lui prouvèrent qu’il avait mis le doigt sur une plaie vive.

Il nous pousserait presque à d’être du côté de Pierre ce con. Presque.

Antoine retourne vivre chez maman (et la persécute un peu au passage). Entre deux cuites et vêtu de guenilles, il décide de passer ses journées à trainer sa misère devant la boutique de son frère. Il lui braille comme un putois des insultes et vocifère son histoire de vol d’héritage à qui veut bien l’entendre avec ses potes mi-ivrognes mi-SDF.

LA FORTUNE DES ROUGON d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre] - CHAPITRE 4

Sa famille par alliance se révélant chaque jour un peu plus merdique, Félicité se met sérieusement à douter de sa perspicacité lorsqu’elle a eu la riche idée d’épouser Rougon. Elle décide de négocier avec son beau-frère pour éviter le scandale. Antoine obtient 200 balles, un Mars, une chambre meublée pour un an et des vêtements neufs.

Adélaïde accueille avec soulagement le départ de son fils (prodigue). Antoine boit tout l’argent assez rapidement et retente le coup de l’intimidation pour obtenir davantage de pognon de son frère. Sauf que cette fois-ci Pierre le fout dehors manu militari. Et comme Félicité avait bien pris soin de faire savoir à tout le monde combien elle et son mari avaient généreusement aidé matériellement ce bâtard d’Antoine, il est conspué par l’opinion publique. Il menace de déshonorer la famille en se faisant contrebandier comme feu son père mais les Rougon n’y croient pas, le sachant bien trop lâche. Alors il se met à chercher du boulot, devient vannier, vend ses paniers, boit ce qu’il gagne, glande, refait des paniers, recommence, vol de l’osier, fait un peu de taule, devient républicain pour trouver une excuse à son arrestation et, au bout de 10 ans de ce régime, ne trouvant pas de solution pour devenir riche et ne rien foutre, décide de se réengager dans l’armée. Mais il rencontre Fine, aka Joséphine Gavaudan, une sorte de petit canon local.

une grande et grosse gaillarde d’une trentaine d’années. Sa face carrée, d’une ampleur masculine, portait au menton et aux lèvres des poils rares, mais terriblement longs. On la nommait comme une maîtresse femme, capable à l’occasion de faire le coup de poing. Aussi ses larges épaules, ses bras énormes imposaient-ils un merveilleux respect aux gamins, qui n’osaient seulement pas sourire de ses moustaches. Avec cela, Fine avait une toute petite voix, une voix d’enfant, mince et claire. (...) Très-courageuse à la besogne, elle aurait pu mettre quelque argent de côté, si elle n’avait aimé les liqueurs ; elle adorait l’anisette. Souvent, le dimanche soir, on était obligé de la rapporter chez elle.

Au-delà de son alcoolisme galopant, la nana fait preuve d’une sensibilité en totale contradiction avec son apparence fort gouleyante et se sort vraiment les doigts du cul : elle enchaîne les boulots sans broncher. Alors...

Antoine finit par se dire que c’était la femme qu’il lui fallait. Elle travaillerait pour deux, et il ferait la loi au logis. Ce serait sa bête de somme, une bête infatigable et obéissante.

Ça aurait trop con de pas l’épouser celui-là.

Se disant que l’occasion est inespérée, Joséphine accepte la demande d’Antoine. Ils se marient, elle bosse, il glande et quand ils picolent, ils se mettent joyeusement sur la gueule.

LA FORTUNE DES ROUGON d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre] - CHAPITRE 4

Les Macquart ont trois enfants : Lisa (du Ventre de Paris), Gervaise (de L’Assommoir) et Jean (de La Terre puis de La Débâcle).

A 12 ans, Lisa, portrait craché de sa mère en plus belle et moins velue, devient la bonniche de la directrice des postes de Plassans qui part vivre à Paris et l’embarque dans ses valises.

LA FORTUNE DES ROUGON d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre] - CHAPITRE 4

Gervaise, conçue dans l’alcool et les coups, se retrouve boiteuse mais néanmoins jolie. Elle est cependant tellement maigre que sa mère la met à l’anisette dès son plus jeune âge pour la fortifier (ce qui n’aura aucune répercussion funeste sur son futur destin). Elle entre par la suite en apprentissage chez une blanchisseuse.

Jean, bien que pas aidé intellectuellement, s’accroche à l’école puis devient apprenti menuisier.

L’ainée s’étant déjà barrée, Antoine vole l’argent que gagnent ses deux plus jeunes enfants (trouvant ainsi un intérêt soudain à sa paternité).

À 14 ans, Gervaise tombe enceinte de (ce gros connard de) Lantier, un tanneur de 18 ans. Macquart le prend moyen bien. Pas par déshonneur non, n’abusons pas, mais parce qu’un bébé ça coûte cher et ça ne sert à rien. Mais comme la mère de Lantier propose de gérer le gamin, Claude (de L’œuvre), Antoine se calme et se retient bien de parler de mariage car il préfère garder Gervaise pour lui (enfin surtout sa paie). Quatre ans plus tard, rebelote : grossesse puis grand-mère paternelle qui offre de s’occuper de son second petit-fils, Étienne (de Germinal, puisque Jacques -de La Bête humaine- né entre ses deux frères, ne sera rajouté plus tard par Emile dans la généalogie Macquart). Et Antoine de remettre encore le mariage à plus tard.

Macquart continue de piller l’argent que gagnent sa femme et (deux de) ses gosses, s’habille comme un prince quand les siens sont en haillons, se tape une copine de Gervaise que Jean courtisait, et humilie sa famille (tout bien comme il avait prévu quand il a rencontré Fine). Et pendant qu’Antoine passe ses soirées à dilapider l’argent du foyer au café, mère et fille cassulent en cachette. Alors quand Antoine rentre, toute la famille se massacre gaiement.

Tout le temps passé au café a donc fait de lui un fervent républicain.

Chaque parti a ses grotesques et ses infâmes. Antoine Macquart, rongé d’envie et de haine, rêvant des vengeances contre la société entière, accueillit la république comme une ère bienheureuse où il lui serait permis d’emplir ses poches dans la caisse du voisin, et même d’étrangler le voisin, s’il témoignait le moindre mécontentement. Sa vie de café, les articles de journaux qu’il avait lus sans les comprendre, avaient fait de lui un terrible bavard qui émettait en politique les théories les plus étranges du monde.

Comme il gueule fort, les cons l’écoutent parmi lesquels le patron du café qui, mi-subjugué mi-terrorisé, cesse de lui faire payer ses consos. Il utilise ensuite ses pseudos convictions républicaines pour ressortir sa vieille haine contre son frère. Pierre qui, quant à lui, s’est plutôt rangé du côté réactionnaire de la force avec ses copains rentiers du salon jaune (comme nous l’avons amplement vu précédemment).

Voyant son frère aîné prendre de plus en plus d’importance à Plassans, Antoine décide de le faire chanter afin d’obtenir une compensation financière au cas où son parti triompherait. Il essaie aussi de s’associer avec Aristide. Pas si con finalement, son neveu refuse l’offre. Alors Antoine va taper chez les enfants de sa sœur Ursule (qui ont entre-temps perdu leur mère, tout comme Antoine l’avait prédit plus tôt) : il y a là Hélène (d’Une page d’amour), dix-huit ans, mariée à un employé, François (de La Conquête de Plassans), vingt-trois ans, et Silvère, six ans. Un an après la mort de sa femme, Mouret, qui l’a moyennement bien pris, se pend. François est embauché par son oncle Pierre pour remplacer Aristide au moment où il réussit à s’en débarrasser (cf Chapitre 2).

Peut-être aussi voulait-il, en acceptant François comme employé, lui offrir une compensation ; il avait dépouillé la mère, il s’évitait tout remords en donnant du travail au fils ; les fripons ont de ces calculs d’honnêteté.

François débarque à Plassans, flanqué de son petit frère Silvère même pas encore scolarisé « lorsqu’on trouva Mouret pendu dans les jupes de sa femme ». Silvère, bouche à nourrir inutile, est sinon martyrisé tout du moins rejeté par François, son once Pierre et sa tante Félicité. Il finit par atterrir chez Adélaïde sans compensation financière supplémentaire de la part de Rougon.

Depuis que tante Dide le chargeait des petites commissions du ménage, elle ne sortait plus, elle vivait étrangère même à sa famille. Parfois [Silvère] songeait à cet abandon ; il regardait la pauvre vieille qui demeurait à deux pas de ses enfants, et que ceux-ci cherchaient à oublier, comme si elle fût morte ; alors il l’aimait davantage, il l’aimait pour lui et pour les autres.

ALERTE, ALERTE : Silvère est un personnage positif ! Ça pue pour lui...

Ils vécurent ainsi dans un silence triste, au fond duquel ils entendaient le frissonnement d’une tendresse infinie.

C’est toujours ça de pris.

Au bout d’un moment...

Pierre, continuant son système de compensation, (...) donna en mariage [à François] Marthe, sa fille cadette, dont il ne savait comment se débarrasser.

Parce qu’elle est un peu tarée comme Adélaïde, sa grande-mère paternelle.

Les deux cousins Marthe et François ont à leur tour 3 enfants (Désirée de La Conquête de Plassans, Octave de Pot-bouille et Au Bonheur des dames, et Serge de La Faute de l’Abbé Mouret). Ils partent vivre à Marseille lorsque Pierre prend sa retraite même si ce dernier avait proposé à son neveu de reprendre son affaire (tellement florissante que la proposition avait été rapidement déclinée). Difficile donc pour Antoine de liguer ce neveu-ci contre son frère. Il se rabat sur Silvère, le plus jeune de l’adelphie alors âgé de quinze ans, qui peut avoir des raisons d’en vouloir à son oncle Pierre, puisqu’il s’est relativement débarrassé de lui comme nous l’avons vu précédemment et qu’en plus il est vilain avec Adélaïde.

Silvère est un gentil, Silvère est exalté, Silvère construit de jolies charrettes, Silvère lit beaucoup, Silvère ne comprend pas tout, Silvère a des ambitions intellectuelles supérieures à sa CSP mais Silvère est un peu con. Alors Silvère est un candidat parfait à l’idéal républicain.

Ce fut un naïf, un naïf sublime, resté sur le seuil du temple, à genoux devant des cierges qu’il prenait de loin pour des étoiles.

Macquart tente donc de rallier son impétueux neveu à sa cause c’est-à-dire niquer Pierre Rougon, son frère. Le problème c’est que Silvère est intègre et pur. Antoine a beau lui raconter par le menu et à grand renfort de mensonges tous les coups de pute familiaux passés et présents (sources de sa pauvreté et de son malheur, pas son côté branleur bizarrement) et lui expliquer en quatorze parties et sept alinéas le pourquoi du comment Pierre et ses potes sont des connards, rien n’y fait : Silvère croit fermement dans une sorte de justice providentielle qui punira les méchants et épargnera les bons. La seule chose qui l’intéresse c’est quand son oncle commence à lui parler politique.

En 1850, Fine meurt après être allée de nuit laver les nippes familiales dans la rivière. La mère de Lantier étant morte à son tour (mais pas d’avoir chopé la crève en rentrant trempée et transie de froid, écrasée sous le poids une pile de linge mouillé), Gervaise s’enfuit avec son (gros connard d’) amant à Paris avec leurs deux enfants sous les bras. Puis c’est au tour de Jean d’échapper à la cupidité paternelle, un jour où il réussit miraculeusement à toucher lui-même sa paie. Devant Silvère, cette ordure de Macquart maudit ses enfants et se pose encore et toujours en victime :

N’avait-il pas toujours été un bon père ? Jean et Gervaise étaient des monstres qui le récompensaient bien mal de tout ce qu’il avait fait pour eux.

Et quoi donc ?

Comme on l’a vu au chapitre 1, les insurgés arrivent dans la ville en pleine nuit avec Miette (la copine de Silvère) à la tête du cortège. Aristide Rougon déambule, le bras faussement en écharpe pour pas prendre les armes, et vient se montrer sans trop en faire pour qu’on puisse à la fois le penser pour l’insurrection ou simple observateur en fonction du point du vue. La mairie tombe assez facilement...

Les prisonniers furent placés au milieu ; outre [le maire] M. Garçonnet et le commandant Sicardot, les insurgés avaient arrêté et emmenaient M. Peirotte, le receveur, et plusieurs autres fonctionnaires.

Oh ben ça, ça tombe bien pour Rougon alors !

Silvère, emporté par la foule, crève l’œil d’un gendarme qu’il voulait désarmer. Paniqué, il s’enfuit chez Tante Dide, sa grand-mère pour lui dire adieu. Il retrouve là Rougon qui a su trouver une utilité à sa mère quand il s’est agi de se planquer. Adélaïde encourage son petit-fils à rejoindre l’insurrection pour venger feu son amant Macquart quand Rougon tente de l’en empêcher pour éviter de jeter l’opprobre sur sa propre famille et nuire à ses intérêts.

Pendant ce temps, nous faisons la connaissance du sympathique cousin de Miette (auquel la gamine s’était refusé parce que bon, la consanguinité et le droit de cuissage ça va bien 5mn). Comme il a la rancune et le priapisme tenaces, il se met à l’humilier en place publique en l’insultant abondamment. Silvère, qui a finalement réussi à s’échapper des griffes de Rougon, colle son poing dans la gueule de l’importun et Miette est désormais convaincue d’avoir fait le bon choix de tout abandonner pour devenir porte-drapeau. Puis la colonne des insurgés s’en va, laissant la ville aux mains d’Antoine Macquart.

LA FORTUNE DES ROUGON d’Emile Zola [contre-profil d’une œuvre] - CHAPITRE 4
A suivre...
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