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GERMINAL d'Emile Zola [résumé rigolo pour un livre qui l'est nettement moins]

GERMINAL d'Emile Zola [résumé rigolo pour un livre qui l'est nettement moins]

C'est l'histoire d'un mec qui atterrit dans les mines parce qu'il se pèle.

En effet, ayant dû quitter Lille où il était machineur après avoir giflé son supérieur (sa propension à l'insubordination ne devait-elle pas laisser présager à ses nouveaux amis qu'il allait copieusement les foutre dans la merde ?), Etienne Lantier, fils de Gervaise Macquart et Auguste Lantier de L'ASSOMMOIR, frère de Claude de L'ŒUVRE, de Jacques de LA BETE HUMAINE et demi-frère d'Anna Coupeau de NANA, erre de par les chemins du Nord de la France à la recherche de n'importe quel travail, en cette seconde moitié du XIX Siècle, bien avant que la zone ne devienne le terrain de jeu des tueurs en série et de l'émission FAITES ENTRER L'ACCUSÉ (en concurrence avec les houillères de Lorraine bien sûr).

Et quoi de mieux que la mine pour satisfaire son besoin de bosser à n'importe quel prix ? Alors plutôt que de crever de froid sur les routes, il réussit à se faire embaucher comme herscheur (pousseur de berlines, les wagonnets servant à charrier le charbon) dans la mine nommée le Voreux, pour remplacer la Fleurance morte subitement de vieillesse à 23 ans, dans l'équipe de Toussaint Maheu, qui comprend, entre autre, sa fille Catherine (herscheuse elle aussi, puisque c'est un travail de gonzesse à la base), ses fils Zaccharie et Jeanlin, Levaque le voisin et le dénommé Chaval.

Et le courant passe immédiatement entre Etienne et la (très) jeune fille, grâce à la fameuse solidarité des herscheuses sûrement... À moins que ce ne soit l'espoir tacite et inavoué d'échapper finalement à un avenir tout tracé de viols et de coups répétés avec Chaval, grâce à l'arrivée miraculeuse et inattendue de ce jeune homme (outre le fait qu'il ne soit pas mal fait de sa personne... Oui parce qu'Etienne a la vingtaine, pas 40 balais, ce qui peut tendre à expliquer voire excuser sa naïveté idéologique mâtinée d'une compréhension pour le moins lacunaire). Nouveau venu qui, soit dit en passant, la prend pour un mec au départ, puisque, la malnutrition et la dégénérescence aidant, elle a 15 piges mais n'est toujours pas pubère.

Mais le Chaval, qui avait plus ou moins projeté de se taper la gamine, voit tout ceci d'un assez mauvais œil... Ou, en tout cas, la vue d'une telle connivence le décide à se dévoiler et à passer à l'acte (et elle à le subir par la même occasion) en lui pissant tout autour et en lui roulant une pelle alors qu'elle expliquait justement à Etienne qu'elle était célibataire...

GERMINAL, c'est donc l'histoire d'Etienne Lantier dont l'arrivée réduira considérablement le nombre de personnes vivant dans la famille Maheu. Car au commencement du bouquin, nous avons le pépé, 58 ans, surnommé Bonnemort pour son côté increvable, et qui, avec son pote le vieux Mouque, fait office de Statler et Waldorf du Muppet Show (bon sauf qu'ils bossent comme des crevards, l'un en tant que charretier en surface et l'autre comme palefrenier en sous-sol). Et puis nous avons aussi la Maheude qui n'a pas de prénom, son fils aîné, Zaccharie, 21 ans, qui a déjà trouvé le moyen d'engrosser par deux fois sa jeune voisine Philomène Levaque. Puis viennent Catherine 14 ans, Jeanlin 11 ans, Alzire 9 ans, Lenore 6 ans, Henri 4 ans, et enfin Estelle, 3 mois. Et cette petite dizaine de personnes vit entassée sous le même toit dans une maisonnette de deux pièces en duplex au milieu du coron des Deux-cent-quarante (nommé sans nul doute ainsi en hommage au poids que pèsent les nourrissons à la naissance ou au nombre de calories ingérées quotidiennement les jours fastes, hebdomadairement la plupart du temps).

Et d'entrée de jeu, dès la première descente d'Etienne au fond la mine, l'ingénieur Negrel et le maître-porion Dansaert font chier notre fine équipe avec le boisage qui est prêt à se casser la gueule. Et là c'est le serpent qui se mord le zboub : si les mineurs prennent le temps de consolider les tunnels, ils ramasseront moins de houille. Et s'ils ramassent moins de houille, ils seront moins payés. Et s'ils sont moins payés, ils auront encore moins à bouffer. Et pour pouvoir bouffer, il faut qu'ils gagnent des sous. Et pour gagner des sous, il faut qu'il ramasse suffisamment de houille. Et pour ramasser suffisamment de houille, ils ne peuvent pas prendre le temps de boiser correctement. CQFD.

GERMINAL d'Emile Zola [résumé rigolo pour un livre qui l'est nettement moins]

Devant les conditions de vie et de travail de plus en plus merdiques, Etienne, en liaison épistolaire avec Pluchart, un ancien collègue de boulot et représentant de l'antenne lilloise de l'Internationale ("sera le genre humain" *air connu*), va faire germer dans la tête de ses nouveaux copains l'idée de créer une caisse de secours afin de pouvoir voir venir si une grève devenait inévitable.

Et la Compagnie des mines de Montsou de les laisser faire...

Sauf qu'en fait elle finit par décréter que le boisage et le charbon seraient désormais payés à part, baisant ainsi la gueule des mineurs (le boisage étant logiquement moins cher payé que le charbon et le temps passé à boiser étant de l'extraction en moins) et les forçant à réagir en se foutant en grève tuant ainsi dans l'œuf leur grand projet de caisse de prévoyance encore insuffisamment remplie pour leur permettre de leur tenir tête sur la durée...

Exactement tout comme l'avait prédit le copain de bistrot d'Etienne, Souvarine, machineur terroriste et anarchiste venu de Russie qui parle toutes les deux phrases de faire sauter la mine (ça non plus ça ne leur a pas mis la puce à l'oreille).

Travailler plus pour gagner que dalle.

Mais pourquoi Maheu et ses potes ne continuent-ils pas à travailler en mode balec en boisant a minima pour berliner plus me direz-vous ?

Et bien tout simplement parce que la Compagnie n'est pas complètement conne et qu'elle a prévu le coup en baissant de deux centimes le prix de la berline (c'est peut-être un détail pour vous mais pour eux ça veut dire beaucoup).

Maheu et sa bande, ainsi encouragés par Etienne et ses élans révolutionnaires (pas l'animal) et poussés par les nouvelles lubies économiques de la Compagnie se mettront donc docilement en grève pour demander le retour à l'ancien système et l'augmentation de 5 centimes par berline dans la foulée (et pourquoi pas cent balles et une pipe pendant qu'on y est ? Ils n'auraient pas un peu attrapé des goûts de luxes ces cons de pauvres ?).

GERMINAL d'Emile Zola [résumé rigolo pour un livre qui l'est nettement moins]

La grève durera deux mois et demi, en plein hiver sinon c'est moins drôle, au cours desquels tout le monde crèvera de faim à petit feu (enfin surtout Alzire) malgré la caisse de prévoyance et malgré l'aide de l'Internationale à laquelle les mineurs finiront tous par adhérer. Il y aura plusieurs conciliations et rencontres infructueuses avec la direction, une retraite au flambeau à travers les différentes fosses qui causera beaucoup de dégâts matériels et l'émasculation du cadavre de Maigrat, l'épicier tué accidentellement par sa couardise et son avarice et qui aimait bien se faire payer sa marchandise en nature par les femmes et les filles des mineurs. Il y aura également l'intervention des soldats qui finiront par tirer dans le tas tuant 14 personnes dont deux enfants, trois femmes et Maheu. Les différentes fosses finiront par rouvrir et les quelques ouvriers qui avaient décidé de retourner bosser se retrouveront coincés sous terre par le sabotage du cuvelage opéré par Souvarine qui partira dans le soleil levant en chantonnant "I'm a poor lonesome cowboy". Au final, les mineurs retourneront bosser la queue basse et la mine déconfite (oh le vilain jeu de mots !) dans d'autres fosses, et la Compagnie obtiendra exactement tout ce qu'elle avait voulu : le boisage et la berline payés à part.

Mais quid des personnages ?

Dans la foulée, la Maheude perdra sa fille Alzire, déjà bien gâtée par la nature puisque née vivante mais bossue, qui mourra de faim, son mari Maheu buté par les soldats, son fils aîné Zacharie (laissant par la même occasion une veuve et deux orphelins), la tête emportée et carbonisé par un coup de grisou alors qu'il piochait comme un fou pour aller libérer sa sœur Catherine, prisonnière de l'effondrement de la mine suite à l'attentat final et enfin sa fille aînée Catherine donc, de faim, d'épuisement et de trop de bonheur d'un coup d'avoir enfin couché avec Etienne en attendant un sauvetage un poil trop tardif. Du coup, avec son vieux beau-père et encore quatre enfants à charge, la Maheude retournera bosser cette grosse feignasse.

Quant au vieux beau-père donc, obligé de cesser ses activités avant même d'avoir atteint l'âge de la retraite pour cause de stockage de flotte dans ses guiboles (en plus de cracher du charbon et ses poumons) et puis ensuite, frappé d'apoplexie, il tentera une première fois, durant la fameuse grande manif un brin bordélique, de buter Cécile, la fille unique des Grégoire, bourgeois rentiers locaux et finira par y parvenir lorsqu'elle viendra leur faire l'aumône au moment où La Maheude attendra que les secours ressortent le corps de sa fille Catherine morte ou vive après l'attentat commis par Souvarine. Meurtre qui, par ailleurs, permettra à la Compagnie de lui sucrer sa pension de retraite, vu qu'il n'y a pas de petites économies.

Etienne, enfin, qui passera de herscheur à haveur quand Levaque partira sur un autre chantier, qui se plaira à galvaniser les foules les faisant joyeusement courir à leur perte...

S'il continuait à s'instruire, dévorant tout, le manque de méthode rendait l'assimilation très lente, une telle confusion se produisait, qu'il finissait par savoir des choses qu'il n'avait pas comprises.

... qui se battra à plusieurs reprises avec Chaval au sujet de Catherine, qui finira par redescendre pour et avec elle à la mine le jour-même de sa destruction, qui tuera Chaval avec lequel il se retrouvera prisonnier sous terre afin de protéger une dernière fois la jeune fille des assauts de son ancien amant, et dont la mort viendra littéralement les hanter avec le charriage du cadavre en décomposition du bonhomme par la flotte dont les tunnels se rempliront (ben alors Emile, on auto-plagie THÉRÈSE RAQUIN ?), qui finira par coucher avec Catherine, une fois la décrue amorcée, pour finalement se rendre compte qu'elle est morte, tout en se surprenant à rêver qu'elle soit enceinte puisqu'elle avait enfin fini par avoir ses règles...

Mais sinon, d'un point de vue du petit détail sordide bien pute, y'a du niveau là ou pas ?

Et puis il s'en ira vers un ailleurs et son destin, retrouver Pluchart à Paris, après avoir reçu l'absolution de la Maheude qui aurait bien aimé se le faire d'ailleurs finalement.

Et je vous passe les détails sur les coucheries, les ragots et les cocufiages qui aident à maintenir la plèbe dans son ignorance crasse en lui filant des os à ronger histoire de tromper la faim (l'ancêtre des réseaux sociaux ?), sur les descriptions prodigieusement précises qui font qu'on est complètement dedans, sur la vengeance qui ne s'obtient qu'au travers du malheur d'autrui, sur la Levaque qui vole la Maheude dont le beau-père vient de commettre un meurtre alors qu'elle sait pertinemment que sa voisine va se retrouver considérablement dans la merde, sur l'absence totale de solidarité et de morale, sur la bassesse et la petitesse d'esprit et de cœur.

Et puis sur les gamins Bebert Levaque et Lydie, la fille des Pierron, les souffre-douleurs de Jeanlin qui découvrent le bonheur de s'aimer enfin juste avant de se faire descendre par les soldats comme des grosses merdes. Et aussi sur Pierron le collabo cocu, sur Catherine qui se fait violemment courtiser, puis bourrer, tabasser et larguer par Chaval. Sur ce gros con de Chaval, justement, qui s'amourache de cette fille uniquement par volonté d'appropriation et par jalousie, sur sa lâcheté et sa cupidité.

Et puis sur la richesse du parallèle entre le chapitre qui narre les évènements advenus en surface pendant et après l'engloutissement du Voreux sur lui-même et celui immédiatement consécutif qui raconte ce qui se passe au même moment sous la terre. Et sur la légère inclination de l'auteur pour l'horreur et le gore à faire passer Stephen King pour un petit joueur, sur le fait qu'il n'y a pas un personnage pour rattraper l'autre, sur la peinture sans concession de la vanité du tribun, sur la fausse philanthropie teintée d'ambition personnelle, sur la bourgeoisie déconnectée qui se vautre dans la profusion de bouffe et la luxure incestueuse, sur la mort du jeune soldat, de la Mouquette et du cheval, sur la tristesse de certaines destinées.

Et enfin sur la distanciation et la froideur factuelle du récit, sur la démarche scientifique de l'auteur dont les personnages sont des sortes de rats de laboratoire qu'il observe évoluer, se débattre et crever, sur la brutalité et la violence de certaines morts qui, sans être spectaculaires, prennent malgré tout aux tripes tant elles rappellent que la vie ne tient à rien, que ça n'est que ça.

Je vous passe donc tout cela parce que c'est un des romans les plus funky de ce grand déconneur de Zola, empli de joie, de bonheur et d'allégresse, qui montre une nouvelle fois tout son amour et sa foi en l'humanité et que ce livre vaut encore aujourd'hui largement la peine d'être vécu.

Et que si l'on s'en tient uniquement au romanesque de l'histoire sans chercher à en comprendre les problématiques sociales et sans faire l'expérience de son esthétique littéraire, on risque de passer complètement à côté de l'essence même de l'œuvre. Un peu comme Claude Berri.

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