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MISS PEREGRINE ET LES ENFANTS PARTICULIERS, le livre de Ramson Riggs [critique]

Il existe deux types de bouquins : ceux qu'on a peur de finir car on ne veut pas affronter le vide que leur absence va laisser, et ceux qu'on a hâte de finir...

Il y aussi ceux qu'on ne finit pas du tout et ceux qu'on finit juste parce que c'est tellement con qu'on veut savoir jusqu'où l'auteur va aller (ou simplement savoir s'il ne va pas nous faire une surprise sur prise à la fin : "c'était une blague !!!")...

Ouais bon en fait, c'est complément débile : il y a plein de types de bouquins.

Mais celui-ci appartient, pour moi, indéniablement à la seconde catégorie : arrivée à la moitié, je commençais déjà à fantasmer sur le prochain livre dans lequel j'allais pouvoir me plonger une fois la lecture de celui-là terminée. Et ça, c'est pas vraiment bon signe.

MISS PEREGRINE ET LES ENFANTS PARTICULIERS, le livre de Ramson Riggs [critique]

Alors peut-être est-ce parce que comme j'en ai vu l'adaptation ciné (très) fidèle (malgré tout) de Tim Burton en premier, il est arrivé un moment où je n'attendais plus rien de l'œuvre originale ? Ou bien est-ce parce que, étrangement, le film était nettement plus merveilleux et inventif que le livre ? Ou est-ce parce que Burton, malgré les défauts de son long métrage, a réussi à magnifier l'histoire d'origine, à en faire un truc plus mature et plus riche, et surtout moins chiant (tout en conservant l'estampille "jeunesse") ?

Car en effet, le comble c'est que Gothy-Timmy parvient à étoffer le roman par divers et habiles procédés qu'il avait là, sous sa godasse :

Il choisit tout d'abord de switcher le don de héroïne avec celui d'un personnage beaucoup plus secondaire (mais en conservant l'identité "Emma Bloom"), en préférant donc à la fille qui fout le feu à tout ce qu'elle touche sans même faire de Kamehameha celle qui est plus légère que l'air.

Il rajoute également des scènes et des détails afin de mettre en valeur visuellement les différentes particularités des pensionnaires ainsi que les caractéristiques singulières de la boucle temporelle (bon, en même temps c'est un peu son boulot aussi) : les visions d'un des enfants comme autant de représentations métaphoriques du cinéaste, les marionnettes d'un autre, gothiques, macabres, transhumanistes, malsaines, terrifiantes mais aussi tellement plus inventives, recherchées, élaborées et plausibles bizarrement (parce qu'un gamin qui est censé exercer son art depuis plus de 70 piges, arrivera sans nul doute à quelque chose approchant ce type de résultats plutôt que de se contenter de soldats d'argile à la con... à moins qu'il ne soit ni très futé, ni très exigeant), l'épave renflouée, le souffle et la salle secrète bien plus improbables mais aussi bien plus poétiques et féeriques, les groles d'Emma, le sauvetage de l'écureuil ou même ce final, plutôt moche, bordélique et bâclé (pour le post-final) mais nettement plus épique qu'une pseudo-baston en haut d'un phare (c'est limite à se demander si le Ramson n'était pas saoulé ou fatigué par sa propre histoire pour pondre un truc aussi peu original dans une histoire qui, à la base, l'était plutôt).

Par la même, Scary-Timmy rend toutes ces particularités plus inquiétantes, plus dangereuses aussi. Ce qui pourrait d'ailleurs tendre à mieux justifier le choix de leur isolement... Bien qu'on ne sache pas vraiment si, de l'œuf ou la poule, c'est cet isolement qui rend certains enfants légèrement sociopathes ou si c'est leur sociopathie qui les a menés à l'isolement.

Ainsi, ce qui est d'autant plus étrange c'est que là où Burton m'avait donné envie de prolonger l'aventure en me plongeant dans sa genèse littéraire, si j'avais lu le livre en premier, je ne suis pas certaine qu'il m'aurait donné envie d'aller voir le film en salle (déjà qu'il ne m'a pas franchement donné envie de lire la suite)... Bon sauf que je suis faible, que je préfère que mes gosses voient ça plutôt que LES TROLLS, que c'est Burton, et qu'une histoire pareille, c'était tellement du sur mesure qu'il ne pouvait pas se vautrer à moins d'une volonté farouche de saboter sa carrière tout seul comme un grand.

Bref, si le film est une adaptation plutôt fidèle dans les grandes lignes, il y a donc tout de même moult différences, l'univers de Burton étant quant à lui nettement plus... Burtonien : fantastique, gothique et stylisé.

Et pour cause : on a l'impression que le roman ne fait que tracer les grandes lignes de son histoire, une histoire certes merveilleuse mais avec des détails bien plus glauques, cauchemardesques et morbides, que Burton choisira par ailleurs de ne pas adapter : la découverte du sous-sol du pensionnat en ruine, la réanimation du cadavre mutilé d'un des habitants de l'île, l'angoisse de l'enfermement...

La guerre est ici plus présente et menaçante quand, à travers le bombardement, elle était moquée et prise comme un divertissement dont on se joue dans le film.

Dès lors, l'histoire surnaturelle du roman, l'ébauche de son univers fantastique avec sa part de noirceur bien réelle, apparaît comme un véritable prétexte allégorique pour mieux raconter en sous-texte la condition des personnes persécutées pendant la seconde guerre mondiale.

MISS PEREGRINE ET LES ENFANTS PARTICULIERS, le livre de Ramson Riggs [critique]
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