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PREMONITIONS de Afonso Poyart [critique]

PREMONITIONS de Afonso Poyart [critique]

C'est l'histoire d'Hannibal Lecter qui a sacrément pris du plomb dans l'aile, au point de collaborer avec le FBI et d'avoir des hallucinations post et pré-"monitoires" qui le plongent dans un clip de Lady Gaga à chaque fois qu'il rentre en contact physique avec un être humain, un objet ou une plante...

Et on se demande d'ailleurs comment il fait pour ne pas vivre à poil et en lévitation... À moins que son don ne s'applique ni aux vêtements ni à ses plantes de pieds.

Enfin, en terme de FBI, il collabore surtout avec son vieux pote Jeffrey Dean Morgan, inoubliable Denis qui nous avait offert une des morts les plus "chiales" dans la série GREY'S ANATOMY (on a les références qu'on mérite). Vieux pote nettement plus jeune que lui, donc, et qui est un agent fédéral en civil, pas un troufion en uniforme siglé des trois grosses lettres jaunes : on est bien évidemment sur de la crème de la crème, là.

Ils vont donc se lancer à la poursuite d'un tueur en série pas comme les autres, une sorte de philanthrope omniscient qui abrégerait le calvaire de personnes atteintes d'une maladie incurable avant même qu'il ne commence. Démonstration :

– Elle suivait une chimio.
– Oui, il y a trois ans. Mais elle était en totale rémission, elle était tirée d'affaire.
– Personne n'est jamais tiré d'affaire : 80% des cancers récidivent et quand ça arrive ils sont difficiles à éradiquer.

Le tout suivi d'un long silence où les personnages se regardent d'un air gêné avec le bruit des petits oiseaux en fond qui résonne comme le passage du corbac dans Nicky Larson et qui constitue à lui seul un magnifique auto-spoiler de la suite... Bon, en même temps le Denis nous a déjà fait le coup de la mort sur un lit d'hôpital donc nous aussi on pourrait parfaitement se la jouer "prémoniteurs" pour le coup... Y'a des acteurs comme ça, qui ont un destin : un peu comme Sean Bean.

Bref, un film avec du méchant pas vraiment irrationnel et du gentil pas complètement gentil, beaucoup de gens condamnés à mort dans la fleur de l'âge, et une bonne idée de départ, plutôt surprenante pour le genre, et gentiment immorale sur l'euthanasie ("une vie de souffrance vaut-elle la peine d'être vécue ?"... Vous avez 4h), qui aurait pu donner quelque chose de bien si ça n'était pas aussi mal écrit, mal interprété et mal réalisé.

PREMONITIONS de Afonso Poyart [critique]

Alors pour comprendre le pourquoi du comment, voici un "Worst of" sélectif (et subjectif) :

Ce qui choque tout d'abord, ce sont tous ces mouvements de caméra bien ostentatoires qui donnent l'impression que les personnages sont épiés en permanence par quelqu'un qui se planque. Ou qu'ils se trouvent en réalité (ou concomitamment) à l'intérieur d'une vision dans la tête du tueur... Ce qui aurait pu être un point de vue intéressant ! Bon, pas "super-super" intéressant non plus, mais surement plus que cette espèce de mauvais épisode de série tv (ou de film érotique avec un voyeur dedans) à gros budget. Budget qui n'a d'ailleurs certainement servi qu'à payer le cachet d'Anthony Hopkins et de Colin Farrell.

Et puis il y a ce déroulement de l'intrigue vu, revu et rebattu, vraiment prévisible : celui du mec avec un gros trauma personnel qui s'est mis au vert et qui refuse d'aider l'enquête mais qui va quand même le faire, puis qui va se barrer mais qui va revenir... Tiens ça aussi ça pourrait être une idée : le type quitte l'enquête et tout le monde fait pareil, générique final, 45mn de film, frustration, originalité et là, là !, vous surprendriez tout le monde (y compris -et surtout- les producteurs).

Et quand je dis qu'il s'est mis au vert, c'est au sens littéral du terme : en effet, le Denis de GREY'S ANATOMY insiste tellement lourdement sur la verdure verdoyante qui entoure la maison céladon de son ami tel un écrin émeraude que ça ne peut pas être fortuit... Mais dans ce cas, cela pose une question au niveau du sens : est-ce un film sérieux ou une parodie ? Parce qu'il y a peut-être des moyens plus subtils que de lui attribuer des réflexions de merde pour montrer qu'un personnage est cool, qu'il aime la vie et qu'il ne "mérite" donc pas de mourir tout ça parce qu'il a vachement de dérision, d'humour et de recul sur lui-même et l'atrocité de son quotidien.

Et puis il y a aussi cette scène d'autopsie durant laquelle Anthony Hopkins se pourlèche les babines à la vue des abats du cadavre... Donc, de deux choses l'une : soit il est tout à la fois complètement sénile et en roue libre, et il a oublié qu'il n'était plus dans LE SILENCE DES AGNEAUX... Soit c'est voulu mais dans ce cas, à part le clin d'œil aux fans, je ne me l'explique pas de façon rationnelle par rapport à l'intrigue, ni par rapport à la catégorie cinématographique à laquelle ce film est censé appartenir.

Ajoutons à ça une réalisation "nerveuse" des scènes d'action comme de l'enquête, joli euphémisme consacré pour ne pas la qualifier de frénétique voire de convulsive à faire facilement exploser un épileptique en plein vol : tout y est confus et bordélique, avec tous ces changements de plan saccadés et ultra rapides, ces balayages en caméra portée, cette instabilité des prises de vue, allant même jusqu'à dissimuler maladroitement le fait que les bagnoles roulent à 40km/h maxi lors de la poursuite obligatoire notée en gros et stabilotée en jaune fluo dans le cahier des charges. Le tout avec de fausses bonnes idées niveau références : du ROMEO + JULIET pour la violence visuelle du montage et le côté "christique-bling-bling-enseignes-lumineuses", ou du THE CELL pour l'aspect clipesque, désordonné et esthétisant des visions.

Et puis il y a aussi cette superbe séquence du portrait-robot du méchant :

Pendant ce temps, Place du Tertre...

Pendant ce temps, Place du Tertre...

– À quoi ressemblait-il ?
– Vous voyez Colin Farrell ? Bon ben vous lui rajoutez juste une cicatrice sur le front.
– Ok, n'en dites pas plus.

Ne jouez pas les vierges effarouchées : son nom apparaît en gros sur l'affiche et vu qu'il ne fait pas partie de la team "gentils", faut pas non plus avoir fait un Master en déduction LV2, coeff 40, pour piger.

PREMONITIONS de Afonso Poyart [critique]

Et puis on sent ce pauvre Anthony Hopkins à l'agonie et l'on craint véritablement pour son col du fémur à chaque fois qu'il se fait un tout petit peu bousculer (et on se dit aussi et surtout que c'est sa doublure pendant une bonne grosse moitié des plans du film... Comme Harrison Ford sur STAR WARS 7 d'ailleurs).

Enfin, citons cette superbe séquence du témoignage du mari éploré, avec effets flashbacks grâce aux visions évolutives d'Hannibal, qui pourrait être dramatique s'il ne faisait pas indubitablement penser à la parodie de les Nuls de la pub Buckler :

– Vous avez dit que vous la quittiez pour une femme ?
– Oui.
– Sauf c'était pour un homme !

Ou un flic ?... Un cycliste ?

– Et, comme tout bon sodomite qui se respecte, vous avez aussi attrapé le SIDA ! Et puis ensuite, vous avez contaminé votre femme !

Et hop, n'en jetez plus : une "complète jambon-fromage" que ça s'appelle dans le milieu.

Et parfois trop (de bonheur, d'images qui piquent, de clichés...), c'est trop pour un seul film.

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