5 Août 2015
Après que sa famille entière a été déportée dans les camps, Tsili, une jeune juive, part se cacher dans la forêt au sud de Czernowicz. En pleine zone de guerre, elle se construit un refuge dans la nature où elle échappe aux sauvageries qui se déroulent dans la vallée.
Son abri est découvert par Marek qui s'adresse à elle en yiddish. Découvrant qu'ils font partie du même peuple ils décident de rester ensemble. Un jour, Marek descend au village chercher des provisions mais ne revient jamais et la guerre finit par prendre fin.
Après avoir quitté son refuge, Tsili rencontre près de la côte un groupe de survivants à la recherche d'un bateau qui pourrait les mener vers un autre monde.
D'un point de vue strictement narratif, à partir du moment où on a lu le synopsis, il ne se passe pas grand-chose de plus.
Mais si l'on est sensible au charme épuré du minimalisme cinématographique, il y a franchement de quoi "s'éclater" :
De la séquence d'ouverture avec cette chorégraphie de l'héroïne sur fond noir, la danse comme seule forme d'expression d'une douleur indicible, au corps même du film, quasiment muet (vu qu'elle est un peu toute seule pendant un bout de temps et qu'elle n'a même pas de ballon à qui parler) et tout le travail sur les sons (les bruitages, le vent, les feuillages, les petits oiseaux, les bombardements), sur tout ce qui se joue hors champ, sur l'animalité, sur la symbolique des formes (le nid qui à la fois protège et enferme), sur l'apparition de la musique comme un retour à la vie, aux prémices d'une civilisation, d'une communauté, un retour de l'espérance, un retour à la réalité pour le meilleur mais surtout pour le pire, où l'héroïne est finalement toujours aussi seule.
Mais (parce qu'il y a un mais), si ce n'est pas le cas, il existe un gros risque de s'ennuyer sec.
Parce que ça reste quand même une heure et demi de Tsili danse toute seule sur un fond noir au son du violon, Tsili court dans les bois, Tsili bouffe des racines, Tsili coupe du bois, Tsili se gratte, Tsili lèche ses écorchures, Tsili rencontre Marek, Tsili veut pas lui parler...
Avec cette quasi absence de dialogues donc, ces (très) longs plans fixes et ces gros plans sur les comportements bestiaux des personnages dans la forêt, retournés par la force des choses à l'état sauvage, qui donnent véritablement un côté documentaire animalier (où on pourrait, si l'on a tendance à rire de tout et surtout nerveusement quand il ne faut pas, s'attendre à l'apparition en voix OFF de commentaires d'un Nicolas Hulot qui chuchoterait de son célèbre phrasé ignorant toute forme de ponctuation).
Bref, une œuvre déroutante, poignante et/ou profondément barbante, pas franchement réaliste, qui a le mérite d'être autre chose qu'un énième témoignage sordide sur la Shoah (même si les images d'archives en conclusion en remettent une petite couche), où l'auteur préfère suggérer, dans le visage de ses deux actrices principales qui interprètent Tsili, dans leurs larmes, dans leur différence d'âge, ce laps de temps, ce lourd fragment de vie qu'on leur a volé et qui ne leur reviendra jamais.
TSILI
Réalisé par : Amos Gitaï / Genre : Drame / Nationalité : Israélien, français, italien, russe / Distributeur : Epicentre Films
Casting : Sarah Adler, Meshi Olinki, Adam Tsekhman...
Date de sortie au cinéma : 12 Août 2015 / Durée : 1h28min