4 Avril 2016
(Ben oui mais non : n'est pas Jean-Jacques Annaud qui veut)
Commençons par le commencement : avant toute chose, plusieurs interrogations me taraudent. Alors permettez-moi de m'adresser à une pro.
Chère Professeur Moustache,
Imaginons que nous sommes en 1944.
Soit une rue de Varsovie passablement en ruine (jonchée de barricades constituées de moult débris d'immeubles alors que les immeubles qui la bordent sont parfaitement intacts), rue que nous nommerons [AB].
Soit D le milieu de [AB].
Soit le segment [CD] (une autre rue de Varsovie que l'on devine tout aussi mal en point... Ou pas), perpendiculaire à [AB] en D.
Soient le point E (personnage principal féminin) milieu de [AD], et F une explosion sur [CD] proche de D, avec une vingtaine de badauds tout autour.
1) Est-ce que le souffle de F pourra propulser E (et uniquement E, pas les figurants à côté d'elle) 5m en arrière ?
2) Est-ce que les vitres des bâtiments pourront résister à un tel souffle ?
3) Est-ce que F pourra créer un nuage qui fera littéralement pleuvoir, 30 bonnes grosses secondes après l'explosion, du sang et tout plein de petits débris humains, épars et gluants de la-dite vingtaine de badauds sur E et ses copains figurants ?
D'avance merci.
INSURRECTION de Jan Komasa (cette scène intervient entre la 52ème et la 54ème minute du film et je prierai Monsieur Komasa de m'excuser pour la qualité plus que médiocre -pour ne pas dire merdique- de l'image et du son, mais c'est à peu près ce qu'on obtient lorsqu'on filme une tablette avec un téléphone).
En attendant une réponse qui ne viendra sans doute jamais, revenons à nos moutons et à une quatrième question qui me brûle... les lèvres (outre le fait qu'on dise à E d'aller chercher bonheur au couvent en remontant la rue et qu'elle s'empresse de la descendre, se dirigeant ainsi vers le lieu de la future explosion, la cruche) :
Qu'ont-ils bien pu vouloir dire avec ce film ?
Non parce que les combats, les bombes, les grenades, les fusils, les chars... on imagine bien que c'est violent et gore et que ça fait de gros bobos fréquemment mortels.
Mais pourquoi donc en rajouter un caisson avec une telle exagération ? Jan Komasa, réalisateur polonais de son état, serait-il un fan du travail de son voisinou allemand Till Kleinert sur DER SAMURAI ? Ou alors le challenge était-il d'obtenir une interdiction aux moins de 16 ans ?...
Ainsi, vous l'aurez compris, le film est volontairement très (trop ?) violent visuellement (idéologiquement ben, c'est la guerre quoi, donc la violence y est inhérente)... Ce qui lui confère un caractère voyeuriste à la limite du comique (involontaire) mais certainement pas réaliste.
Et cette impression se trouve renforcée par toutes ces scènes hallucino-poético-what-the-fuck, ces "parenthèses enchantées" et autres séquences "chatte" (de l'expression "avoir de la chatte", un peu comme l'animal qui retombe toujours sur ses pattes et pas du tout dérivée de cette autre expression distinguée : "avoir un gros coup de moule") qui abusent du ralenti, des effets pyrotechniques et d'une musique complètement anachronique, montrant ainsi que seuls ceux qui ont le cœur vraiment pur méritent de traverser les tirs ennemis sans foutre de la viande partout.
Et pourtant, comme dans tout bon film de guerre qui se respecte, presque tout le monde crève de façon plus ou moins trash, avec un petit côté GAME OF THRONES qui autospoile la trame narrative du film : dès lors que l'on s'attache à un personnage, pour peu qu'il soit tout mignon et innocent, il meurt. Alors forcément, une fois qu'on l'a pigé, le jeu revient juste à deviner de quelle manière abjecte et choquante chacun va bien pouvoir y passer.
Et tout le monde crève de façon plutôt plus trash que moins en l'occurrence et en fonction de l'importance du personnage dans le scénario : parce que vous comprenez, des fois, il y a des gens qui mangent un coup de canon de char d'assaut dans le bide mais qui réussissent quand même à prononcer une dernière phrase capitale et lourde de sens alors même que leurs viscères pendouillent lamentablement hors de leur abdomen...
Bref, presque tout le monde crève, donc, un peu comme dans la vraie vie d'ailleurs, ce qui est parfaitement antinomique avec la trivialité macabre excessive et irréelle.
Et on en vient à sérieusement se demander quel a bien pu être le message recherché... À part, peut-être, que la jeunesse patriotique est un peu insouciante et inconsciente (ou juste complètement conne) et que la guerre se charge de bien-bien lui remettre les pieds sur terre à grand coup d'horreurs gratuites et outrancières dans la gueule... Mais qu'en même temps, on n'a rien sans rien et qu'il fallait bien qu'un bon tiers de la population locale se fasse déboîter la tronche pour que la ville soit libérée... Et puis que le Grand Amour, celui qui, ici, ne connait aucune barrière de classe sociale, triomphe de la barbarie (oui, je sais, "aucun rapport", mais c'est pas moi qui ai écrit le scénar : ce serait nettement plus incohérent sinon !).
A côté de ça, force est de constater que le film est aussi bigrement esthétique : les acteurs sont tous très beaux, très lisses, leurs yeux bleus ressortent superbement lorsqu'ils ont la gueule maculée de suif et de diverses matières organiques, l'héroïne blonde a un incroyable pouvoir autonettoyant et sa tresse REINE DES NEIGES est autorecoiffante, les fringues (qu'on leur prête au gré de leurs pérégrinations où ils se retrouvent tout pourris) sont toujours parfaitement ajustées...
Et l'on sent bien qu'il y a eu du budget, un vrai travail sur les décors, les costumes, et un réel souci du détail... Mais tout apparaît un peu trop neuf, trop nickel, trop parfait justement.
On en ressort donc avec un sentiment très mitigé : un film pas complètement mauvais, qui essaie de proposer quelque chose de différent sans réussir à l'être véritablement.
Un film européen mais qui lorgne du côté des États-Unis dans sa réalisation (ses clichés scénaristiques et ses goofs aussi), tout en cherchant à se démarquer. Ce qui le pousse à en faire parfois trop, au risque de tomber dans la démesure et de desservir son propos en faisant décrocher le spectateur qui n'y croit plus.
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