3 Octobre 2016
Ou quand un québécois se lance dans la tragédie grecque, mais libanaise.
À la mort de leur mère Nawal, les jumeaux Simon et Jeanne Marwan se voient confier deux enveloppes par le notaire Jean Lebel, exécuteur testamentaire, ancien employeur de la défunte et dépositaire de son secret. L'une devra être remise à leur père qu'ils croyaient mort et l'autre à leur frère dont ils ignoraient l'existence. Cette quête va les mener loin du Québec, sur les traces parsemées d'horreur de la jeunesse de leur mère au Proche-Orient et du mystère autour de leur naissance.
Will of Mrs. Nawal Marwan...
To Notary Jean Lebel : Bury me with no casket, no prayers, naked, face down, away from the world.
Stone and epitaph : I want no gravestone, nor my name engraved anywhere. No epitaph for those who don't keep their promises.
To Jeanne and Simon : Childhood is a knife stuck in your throat. It can't be easily removed. Jeanne, Mr Lebel will give you an envelope. The envelope is for your father. Find him, and give it to him. Simon, the notary will give you an envelope... The envelope is for your brother. Find him, and give him the envelope.
When the envelopes have been delivered you will be given a letter. The silence will be broken, a promise kept, and you can place a stone on my grave and on it engrave my name in the sun.
Alors c'est vrai qu'il est chouette son film, avec ses filtres, ses reconstitutions hyper réalistes, ce gros côté dégueulasse et absurde de la guerre, son ambiance oppressante, ses personnages forts et attachants, son montage bordélique mais néanmoins intéressant, ses rôles féminins qui sortent de la simple figuration, et ses scènes d'une cruauté tellement violente qu'elles donnent envie de hurler (wouhouuuu, la scène du bus !!!!).
Parce que, fut un temps, "l'homme qui aimait filmer les choses vues d'au-dessus et les paysages en déplaçant douuuceeeeemennt la caméra" savait donner de vrais rôles aux femmes. À l'époque où il était encore au scénario... Mais, cela-dit, ce même scénario est en réalité adapté de la pièce de théâtre éponyme de Wajdi Mouawad, deuxième volet d'une tétralogie intitulée "Le sang des promesses". Ce qui explique sans doute l'épaisseur exceptionnelle des personnages féminins que l'on ne retrouve pas dans les deux autres films précédemment cités (ainsi que la puissance des dialogues).
Si l'on n'est pas du tout (mais du tout) dans du théâtre filmé ici (ce qui est une très bonne chose même si, en sortant de la suggestion, on rend le récit nettement plus cru, plus dur, à la limite du supportable), je crains que ce ne soit par là que le bât blesse : parce que, comme dans tout film de Denis Villeneuve qui se respecte, il y a un truc qui cloche. Et celui-ci n'échappe pas à la règle (pas que ça me réjouisse, je trouve ça plutôt frustrant même).
En effet, c'est le genre de films qui fonctionne sur LA révélation finale, pour laquelle on peut d'ailleurs vous le vendre en vous disant :
Si tu aimes les très gros twists qui retournent le cerveau, ce film est fait pour toi !
Et bien c'est une très belle gifle, en effet, à laquelle on ne s'attend pas et pour laquelle on se dit :
Oh putain, je l'ai pas vue venir... Mais attends... On ne PEUT PAS la voir venir en fait !!!
Et si le dénouement ne gâche pas le corps du récit (ni sa réalisation), gageons que l'émotion doit être certainement beaucoup plus intense lors des représentations théâtrales parce qu'elles ne nécessitent pas d'être vraisemblables... Même si les sanglots déchirants des jumeaux prennent aux tripes et même si la citation finale de cette mère qui meurt de désespoir arrache une partie de notre âme (ou fait tout du moins franchement trembloter le menton).
Un plus un, ça peux-tu faire un ?