10 Septembre 2016
Andreas Saint Loup est apothicaire (comme le Port-Salut, c'est marqué dessus). Un jour il découvre une pièce vide dans sa maison dont il avait complément oublié l'existence ainsi qu'un tableau le représentant aux côtés d'un gros espace vide. Alors par l'habile truchement du destin, des intrigants de la cour du roi Philippe IV (le persécuteur de Templiers) et des secrets liés à sa naissance, il va se retrouver embarqué dans un road trip à travers la France, l'Espagne (et plus si affinité), le tout flanqué de deux jeunes gens, à la recherche du personnage manquant dans son tableau et dans sa vie.
L'APOTHICAIRE est un livre franchement déroutant car il s'amuse à mélanger les genres : à mi chemin entre l'épopée médiévale ou le récit de voyage en prose pour l'usage du vieux françouais et le sujet-même du livre (le vrai-faux pèlerinage, la quête initiatique...), et le roman-feuilleton payé à la ligne pour les longues (très longues) et nombreuses (très nombreuses) descriptions (voire accumulations), l'auteur jouent à la fois sur les vannes et autres expressions fleuries anachroniques savoureuses (genre "Je m'en tape jovialement les bourses", qu'il serait de bon ton de diffuser et de démocratiser au plus vite), les apartés où il interpelle directement le lecteur et un côté philosophico-métaphysique-gnan-gnan-l'âme-du-monde insupportable qui allume chez moi tous les signaux d'alerte : ATTENTION ATTENTION, CECI N'EST PAS UN EXERCICE, CE ROMAN POSSEDE DES SIMILITUDES INDÉNIABLES AVEC L'ALCHIMISTE, VEUILLEZ GARDER VOTRE CALME ET VOUS DIRIGER VERS LA SORTIE LA PLUS PROCHE.
Le héros (ou l'anti-héros), Andreas, ressemble en de nombreux points à Gregory House (de la série éponyme pour les trois du fond qui ne posséderaient pas cette référence ô combien intellectuelle) pour son irrévérence, son addiction à la vicodine de l'époque, son aura sur les nanas pas trop bêtes à peine pubères (mais pas physiquement où là c'est plus un pré-quadragénaire chauve... Un peu comme Homer Simpson... En moins jaune... Et en moins gros... Et puis en moins con).
Un livre qui donne étrangement envie de relire les rois maudits (pas d'en revoir l'adaptation télé, faut pas charrier).
Mais là où le bât blesse c'est que trop de descriptions tue la description, casse le rythme de lecture voire les jambes du lecteur. Parce qu'énumérer à chaque nouvelle ville traversée par les personnages toutes les professions qu'ils peuvent y croiser, ainsi que les styles de portes, de façades et de linteaux, à terme, ça devient légèrement lassant... Et si l'on veut vraiment faire du mauvais esprit, on pourrait même croire que l'auteur utilise ces énumérations comme prétexte pour caser des références érudites du mec qui a effectivement réalisé le pèlerinage à Saint Jacques de Compostelle, qui a vachement bien potasser son sujet et qui tente d'amortir à fond son voyage.
Mais, parallèlement, il fait preuve d'une grande autodérision, comme s'il était conscient qu'en imitant ce style un poil pompeux, c'est chiant.
Et pourtant, malgré toute la sympathie que j'ai pour son auteur (que j'avais entendu en interview dans LA MORINADE, cette émission de radio tellement géniale qu'on était 4 et demi à l'écouter) et le respect que j'éprouve pour les gens qui ont le talent (et les couilles) d'écrire des romans, pour la somme de travail et de recherche que cela représente, je n'ai pas accroché, allant jusqu'à m'adonner à une pratique sacrilège (bien qu'autorisée par Daniel Pennac) : lire en diagonale.
Alors voilà, maintenant je me sens sale et je me dégoûte. C'est malin !