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THE VISIT de M. Night Shyamalan [critique]

– Salut tout le monde, je m'appelle Loretta, j'approche la quarantaine et je suis maman de deux adorables coquinous de 15 et 13 ans et je dis pas ça parce que c'est toi qui filmes ma chérie.
– Maman, je t'ai demandé d'être naturelle. Rappelle-toi que je tourne un documentaire sur toi.
– Ok, c'est pas bizarre du tout ni narcissiquement perturbant, alors, allons-y : quand j'étais au lycée, je suis tombée amoureuse de mon prof d'histoire. Comme mes parents étaient moyennement chauds pour que j'aille vivre avec lui, je me suis barrée de chez eux. Et ça fait... ben depuis ce jour-là que je ne les ai pas revus en fait. Pfiouuuuu, comme le temps passe !
– Qu'est-ce qui s'est passé ce jour-là ?
– Alors ça c'est pas à moi de te le dire. Mais si tes grands-parents veulent t'en parler, grand bien leur fasse.
– Et pourquoi c'est pas à toi de me le dire ?
– Euh... Et ben... parce que... c'est... marqué dans le script ?
– Non parce que de deux choses l'une soit il s'est passé un truc très grave et dans ce cas tu as sciemment décidé de nous faire du mal en nous envoyant là-bas. Soit il s'est passé un truc pas si grave que ça et ce n'est qu'un prétexte narratif caché derrière de la fausse fierté toute pourrie pour installer une ambiance angoissante, étant donné que tu sembles plutôt ouverte et loquace comme nana.
– Joker ? La réponse C ? Obi-Wan Kenobi ?
– Arrête d'être conne Maman...
– Ça va être dur mais je vais essayer. Donc, entre temps, j'ai eu deux enfants avec mon prof d'histoire mais, du jour au lendemain, il nous a plaqués tous les trois pour refaire sa vie en Californie avec une autre nana et il a complètement coupé les ponts avec nous.
– Oui, la vie est une fête.
– Voilà. Alors comme depuis son départ c'est moi qui me cogne l'éducation des deux connards toute seule, quand mes parents ont repris contact avec moi, qu'ils m'ont dit qu'ils voulaient rencontrer leurs petits-enfants et qu'ils proposaient de m'en débarrasser pendant une semaine de vacances, j'ai un peu hésité.
– Maman...
– Bon d'accord, j'ai sauté de joie et dansé toute nue au clair de lune en récitant des versets sataniques à l'envers comme me l'avait appris mon papa.
– Quoi ?
– Oups, *installation d'une ambiance inquiétante très-très subliminale* je crois que j'en ai trop dit. Alors non, bien sûr ! En réalité, comme j'ai su rester jeune et fofolle dans ma tête, je me suis dit : Yeah ! Why not ?!? You Only Live Once ! Feu, c'est parti, envoyons les gosses à 7h de bagnole de la maison, chez des vieux avec qui je suis suffisamment fâchée pour ne les leur avoir jamais présentés et comme ça j'en profiterai pour partir en croisière avec mon nouveau mec histoire de ne surtout pas pouvoir intervenir en urgence.

Car, à l'instar de François dans LE VIEUX FUSIL, Loretta a de très bonnes idées.

THE VISIT de M. Night Shyamalan [critique]

Ajoutons à tout cela les grands classiques du film d'horreur qui servent à renforcer l'ambiance oppressante déjà instaurée par l'incohérence maternelle : la neige, la ferme isolée, une vieille échevelée qui danse à poil la nuit, une vieille bien coiffée qui prépare beaucoup trop de choses à manger pour être honnête, une remise, un sous-sol interdit, un couvre-feu, un puit, un four, des comportements pas tout à fait rationnels, des rires hystériques et effrayants, du passage devant la caméra avec sortie du cadre et réapparition soudaine à l'écran par en-dessous, du groupe de un, de l'orage incroyablement raccord pour remplacer la musique qui amplifie habituellement les jump-scare, de la confession larme + morve + bave en gros plan face caméra façon THE BLAIR WITCH PROJECT, de l'obscurité balayée à la lampe torche...

THE VISIT de M. Night Shyamalan [critique]

Parce qu'on est nettement plus ici sur de l'épouvante que sur de l'horreur pure, sur du thriller horrifique et psychologique. Et parce que le réalisateur utilise ostensiblement tous ces menus détails inhérents au genre, qu'il les maîtrise, les détourne et s'en amuse. Alors si vous vous attendez à voir du slasher, du fantastique, du gore ou du paranormal vous risquez d'être grandement désappointés.

En effet, l'intention de renouveler le sous-genre du found footage était fort louable de la part de M. Night Shyamalan. Et le fait de placer son film à hauteur d'enfants ou plutôt d'ados étaient même plutôt habile.

Parce que, comme tout personnage dans ce type de métrage qui se respecte, c'est très con un ado de film d'horreur : ça fait des parties de cache-cache sous la maison, c'est innocent et c'est naïf, ça n'a pas forcément des heures et des heures de visionnage de films-flipettes derrière soi, ou bien si c'est le cas c'est un peu trop présomptueux, alors ça fonce tête baissée dans tous les pièges, et puis ça joue à se faire peur... Putain c'est vrai que c'est con un ado dans un film d'horreur !

THE VISIT de M. Night Shyamalan [critique]

Alors forcément le procédé ajoute à la suggestion et même si ce n'est pas le genre de film qu'on revoit plusieurs fois, le rebondissement presque final est plutôt bien amené... En même temps, faut dire que c'est son truc à Nighty, le twist.

Mais c'est sûr que pour apprécier l'ensemble, il faut passer outre l'improbabilité de l'irresponsabilité de la mère qui malgré ses hormones en ébullition semble, somme toute, dotée d'un cerveau. Et il faut aussi supporter le flow du petit frère qui donne des envies de violence physique et verbale à son endroit.

THE VISIT de M. Night Shyamalan [critique]

Alors même si ce n'est pas un grand film, ça reste franchement une bonne surprise avec de la référence (de HANSEL ET GRETEL à PSYCHOSE en passant par la Lorraine avec ses sabots), du second degré et de la thérapie très alternative pour résoudre les blocages psychologiques. Un film qui, certes, ne vous empêchera pas de dormir mais qui se trouve être plutôt honnête et pas complètement stupide dans ce qu'il propose.

THE VISIT de M. Night Shyamalan [critique]
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