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120 BATTEMENTS PAR MINUTE de Robin Campillo [critique]

Est-il encore nécessaire de présenter le sujet de ce film, les membres de l’association de lutte contre le SIDA Act Up Paris, leurs combats pour une vraie politique de prévention et contre le cynisme des laboratoires pharmaceutiques et puis la réalité de la maladie, l’amour et la vie malgré la mort qui ronge petit à petit l’espoir ?

Un film que j’aurais adoré détester. Parce qu’unanimité, parce que tapage médiatique, parce qu’intouchable, parce qu’esprit de contradiction à la con, parce que plein de César et que ce n’est pas forcément un gage de qualité... Mais comme il ne faut pas mourir idiot et que pour dégueuler sur quelque chose, il faut au moins s’être donné la peine de l’avoir vu, je m’y attelais, un peu à reculons.

Je partais donc avec un maximum d’a priori dans ma musette. Déjà parce que j’associais très légèrement Nahuel Pérez Biscayart à un type suçant un gros boulanger belge et faisant la marionnette avec sa bite pendant une bonne partie du Cendrillon moderne et cradouille JE SUIS À TOI et qu’il était d’un naturel tellement confondant qu’on pouvait se demander si c’était vraiment un rôle de composition ou si le réalisateur n’était pas véritablement allé chercher un gigolo argentin séropositif pour son film (ce qui laissait tout de même présager l’étendue du talent d’acteur du bonhomme). Et puis aussi parce que je craignais un truc bien caricatural, bien clivant, bien manichéen, bien moralisateur, bien culpabilisant, bien stéréotypé...

Et puis pas du tout.

Quelle déception : 120 BATTEMENTS PAR MINUTE est un beau film d’une grande humanité.

120 BATTEMENTS PAR MINUTE de Robin Campillo [critique]

Même les scènes de cul, qui, d’ordinaire, ont tendance à sonner extrêmement faux et à me faire copieusement chier dans la plupart des films tant elles sont racoleuses et inutiles d’un point de vue narratif, sont ici importantes et belles. Des scènes qui pourraient sembler trash en dehors du cinéma porno mais qui respirent l’amour et parfois la tristesse et la désespérance.

Et ce qui est étrange et plutôt pédagogique au fond (à moins que ce ne soit utopique) c’est que je n’avais pas du tout cette vision là d’Act Up. Et je pense que pour beaucoup de membres de la génération Y-Sidaction-Nuit du Zapping-Solidarité Sida (qui avaient donc 10 à 15 ans de moins que les héros du film au même moment et qui n’ont jamais connu la sexualité sans le SIDA), Act Up, c’était un peu les méchants parmi les gentils, parce qu’ils étaient plus virulents, parce qu’ils étaient moins peacefull, plus agressifs, plus violents moins Flower Power alternatif « Faites l’amour avec des capotes pas la guerre »... Une sorte de version interdite au -16 ans des associations à laquelle on n’avait pas accès.

« Sens inné de la déco sur mur de chambre », Satyricon(ne), 14 ans, 1996

« Sens inné de la déco sur mur de chambre », Satyricon(ne), 14 ans, 1996

Ainsi, ce film, par son énergie et sa force, réussit à faire resurgir des choses éminemment personnelles, et nous renvoie à nos propres peurs, à notre propre rapport à cette maladie, à l’époque et à la lutte contre cette saloperie, au combat qui n’est pas terminé, ni pour nous, ni pour les générations futures. Grace, entre autres, aux talents de ses interprètes, il réussit également le tour de force de parler de la mort avec énormément de vie, et à démontrer, une nouvelle fois, que l’humour et la provocation sont souvent le meilleur moyen de faire passer un message.

120 BATTEMENTS PAR MINUTE de Robin Campillo [critique]

Et puis la dignité de la mère et la scène de l’habillage m’ont flinguée.

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